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Faut savoir se contenter de beaucoup (2015)
de Jean-Henri Meunier
publié le mardi 9 février 2016

par Jean-Max Méjean
Jeune Cinéma en ligne directe

Sortie le mercredi 10 février 2016


 


Faut savoir se contenter de beaucoup n’est pas un film limpide et s’il fait sourire, voire rire parfois presque aux larmes, c’est qu’il ne veut pas nous faire pleurer sur l’état de décomposition avancée de notre société.

Jean-Henri Meunier a trouvé une sorte de couple à la Laurel et Hardy pour interpréter le rôle de deux révolutionnaires à la recherche d’une Cadillac noire pour faire on ne saura jamais trop bien quoi. Peut-être la révolution ?
Dans leur road-movie à travers l’Hexagone, nos deux compères vont rencontrer beaucoup de monde, surtout dans les bistrots où se prépare le Grand Soir, mais aussi dans des forêts hérissées de tentes de protestation.


 

Ce sera souvent drôle, mais toujours un peu désespéré. Comme si tout du long, on ne cessait de penser à ces paroles de la chanson de Léo Ferré :
Il n’y a plus rien
Camarade maudit, camarade misère...
Misère, c’était le nom de ma chienne qui n’avait que trois pattes.
L’autre, le destin la lui avait mise de côté pour les olympiades de la bouffe…


 

Avec son côté un peu monsieur Hulot, accroché à son vieux cartable déglingué d’instituteur, Noël Godin-l’entarteur, auteur entre autres de la fameuse Anthologie de la subversion carabinée, rencontre une autre figure de la subversion, Jean-Marc Rouillan, ancien membre de Action directe. (1)


 


 

Ce cocktail détonant a le goût de la mélancolie, le parfum des illusions perdues et le désespoir qui se cache derrière un humour presque british. On le sait, la révolution, ce n’est pas de la tarte et Jean-Marc Rouillan en a fait l’expérience, lui qui sort de taule pour aller dénicher un tas de tôle, uniquement de la marque Cadillac - comme ce vieil aspirateur que Noël Godin passe sur le sol telle "la ménagère du cinéma français", titre que s’était attribué jadis un autre révolutionnaire, Jean-Luc Godard.
Si Godin n’entarte pas, par contre il patauge gaiement dans la gadoue, tandis que Rouillan fait semblant de vouloir l’aider à s’en dépêtrer. On n’est pas dans la mouise, semble nous dire le réalisateur.


 

Cette sympathique escapade nous fait visiter la fine fleur de la révolution qui vient, notamment ces babas campagnards qui se battent pacifiquement pour empêcher la création du barrage de Sivens, où l’on croit apercevoir Éric Petetin, de tous les combats.

On ne saura jamais si les voyageurs trouveront leur Cadillac avec l’aide de Gitans, dont le chef est magnifiquement interprété par Sergi Lopez.


 

On se dit que la révolution n’est pas en marche avec ces doux qui préfèrent rêver un monde meilleur plutôt que se battre contre le capitalisme international.
Le film est le constat de la fin de toute possibilité de révolution dans une société occidentale assoupie, assistée et schizophrène.


 

À moins que la suite, déjà en tournage, ne nous prouve que l’avenir radieux n’est pas si loin, à condition de trouver une Cadillac.
Avanti popolo, etc.

Jean-Max Méjean
Jeune Cinéma en ligne directe (février 2016)

1. NDLR : J.M. Rouillan, qui, aux dernières nouvelles, a des problèmes de communication avec les médias (7 mars 2016).
Entendre ses propos exacts :
Lire le making off de l’émission.


Faut savoir se contenter de beaucoup. Réal, sc : Jean-Henri Meunier ; mont : Jade de Brito Lopes. Int : Jean-Marc Rouillan, Noël Godin, Miss Ming, Jan Bucquoy, Sergi Lopez, Jean-Pierre Bouyxou, Bernardo Sandoval (France, 2015, 88 mn).



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