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Mountain (2015)
de Yaelle Kayam
publié le mardi 3 janvier 2017

par Jean-Max Méjean
Jeune Cinéma en ligne directe

Sortie le mercredi 4 janvier 2017


 


Le cinéma israélien par sa force, son courage et son inventivité nous étonne toujours.

Après Tikkoun de Avishai Sivan, qui abordait le fait religieux du côté d’un jeune homme, Yaelle Kayam, pour son premier long métrage, l’envisage du point de vue d’une jeune femme juive délaissée par son mari. Elle nous offre un film novateur sur divers plans Le sujet, déjà, courageux et traité frontalement. "J’étudie la souffrance physique et morale d’une femme qui est une épouse et une mère. Une femme qui n’est plus désirée par son mari mais qui éprouve encore du désir pour lui, dans un lieu extrêmement chargé de sens puisqu’il se situe au carrefour des trois religions monothéistes du monde".


 

En effet, le couple et les enfants habitent dans une petite maison à l’intérieur du plus ancien cimetière juif du mont des Oliviers. Dans la beauté des tombes blanches et scintillantes de ce décor naturel, Yaelle Kayam fait se rencontrer des mondes qui vivent en parallèle dans l’État d’Israël. Depuis le mont des Oliviers, le paysage s’ouvre sur le mont du Temple qui, selon la croyance, sera le lieu élu pour la résurrection des corps ensevelis ici. Situer l’histoire dans un lieu clos et marqué par tant d’événements religieux apporte au film une autre dimension. Épouse d’un Juif religieux, interprété par le grand Avshalom Pollak, Tzvia - époustouflante Shani Klein - va découvrir la vie invisible du cimetière. Outre les touristes qui, cartes à la main, gravissent le mont sous un soleil de plomb, elle s’y promène lorsqu’elle s’ennuie de ses tâches domestiques. C’est ainsi qu’elle croise souvent le gardien du cimetière, le Palestinien Abed, interprété par Haitham Ibrahem Omari, avec qui elle échange quelques rares mots, mais qui en disent long sur cette cohabitation interreligieuse.


 

Une nuit, lasse que son mari la délaisse et rentre de plus en plus tard, elle sort se promener dans le cimetière. C’est là qu’elle entend les cris d’une femme qui ne font aucun doute sur leur origine : la nuit, le cimetière devient un lieu de rendez-vous pour les prostituées et leurs clients. Au lieu de s’en offusquer, Tzvia reviendra toutes les nuits, fascinée par ce spectacle, se faisant admettre par les prostituées et leurs souteneurs, allant même jusqu’à les nourrir.

Il y a dans ce film un charme fou à la Buñuel, et aussi une vision particulièrement forte du désir féminin qui brosse un portrait en creux de la solitude féminine dans des pays à domination masculine. Son propos est quasiment sacré ainsi que la réalisatrice l’explique : "Dans la Bible, il y a toujours la femme respectable et la prostituée, Ève et Lilith, Marie et Marie-Madeleine. C’est la figure de la femme vertueuse que j’ai voulu explorer, qui veut être cette personne respectable, qui fait tout ce qu’elle est censée faire selon la société pour être heureuse, mais qui n’est pas appréciée pour autant."

Jean-Max Méjean
Jeune Cinéma en ligne directe

Mountain. Réal, sc : Yaelle Kayam ; ph : Itay Marom ; mont : Or Ben David. Int : Shani Klein, Avshalom Pollak, Haitham Ibrahem Omari (Israël-Danemark, 2015, 83 mn).

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