home > Films > Home (2016)
Home (2016)
de Fien Troch
publié le mardi 12 septembre 2017

par Jean-Max Méjean
Jeune Cinéma n° 382-383, automne 2017

Sortie le mercredi 13 septembre 2017


 


L’idée de départ du quatrième long métrage multirécompensé de la réalisatrice belge Fien Troch, est de montrer que la réalité dépasse parfois la fiction.
S’inspirant de faits réels, et de sa propre adolescence, elle rend hommage à ce bel âge dont on sait, depuis Rimbaud, qu’il n’est pas sérieux - mais il s’agissait d’une antiphrase poétique, car l’adolescence est un âge sérieux, difficile, peuplé de cauchemars et de rêves qui ne verront sans doute jamais le jour. Avec l’aide de Nico Leunen, son mari (et son monteur), elle revient sur cette période troublée.


 

La jeune fille qui ouvre le film, dans le bureau du proviseur, représente une sorte de double, qui observe les jeunes qui l’entourent et qui réfléchit, aux deux sens du terme - elle est un miroir mais aussi un moteur pour le déroulement de l’action même si elle semble passive.

Fien Troch, connaissant l’importance des réseaux sociaux, a tenu à incorporer à ses propres images les vidéos réalisées par les jeunes (des non-professionnels) avec leurs smartphones.


 

Cela donne certes un mélange de genres, mais pas seulement. Cette intrusion, avec changement de format de l’image, n’est pas anecdotique. Elle apporte plus de réalisme, comme si le spectateur se trouvait devant un documentaire - la production avait décidé de confier un téléphone à chacun des jeunes acteurs avec pour consigne de filmer ce qu’ils voulaient. Cette idée ponctue le film et atteint son acmé dans la scène capitale du matricide.

En effet, Home n’est pas un hommage à la famille et au foyer, au contraire. La réalité est tordue et exprimée jusqu’à sa substance par la narration, rendant le film particulièrement angoissant. On pense bien sûr à Larry Clark, notamment dans les séquences dites de sexe explicite, mais pas seulement. Il y a également une référence, parfois lointaine, aux frères Dardenne, sans leur côté misérabiliste et un peu pathétique. Le réel se donne ici avec toute sa force, même si nous savons que le cinéma n’est pas la réalité, ni son reflet, ni même son miroir.


 

Les adultes sont montrés de façon assez monstrueuse, notamment les mères, ou froides, ou abusives et incestueuses. La réalisatrice tord le cou aux idées reçues en proposant non pas, comme il est commun, un inceste d’un père envers sa fille, mais celui d’une mère envers le fils dont elle a abusé depuis qu’il avait 3 ans. C’est à ce moment-là que Home ouvre la porte à l’horreur.
"Ce meurtre est une explosion, explique Fien Troch. Celle d’un garçon qui, quinze années durant, a connu l’abus. C’est pourquoi le crime devait être brutal. Dans le documentaire qui m’a servi de trame, ils le disaient également : quand un enfant abusé tue l’un de ses parents, c’est toujours une explosion de violence, car toute sa douleur s’exprime à ce moment précis."

Jean-Max Méjean
Jeune Cinéma n° 382-383, automne 2017

Home. Réal, sc : Fien Troch ; sc, mont : Nico Leunen ; ph : Frank Van den Eeden ; mu : Johnny Jewel. Int : Jeroen Perceval, Kevin Janssens, Tom Audenaert, Jan Hammenecker (Belgique, 2016, 103 mn).

Revue Jeune Cinéma - Mentions Légales et Contacts