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Square (the) (2017)
de Ruben Östlund
publié le mercredi 18 octobre 2017

par Lucien Logette
Jeune Cinéma n° 381, été 2017

Palme d’or du Festival de Cannes 2017

Sortie le mercredi 18 octobre 2017


 


Ultime titre sélectionné, alors que sa pellicule était à peine sèche, le film de Ruben Östlund a constitué une bonne pioche, puisque le jury lui a décerné la récompense suprême. Tant mieux pour le réalisateur, qui, au fil des ans, affine son travail, depuis son The Guitar Mongoloid (2004), resté dans la mémoire de ses rares spectateurs.

Le square du titre n’est pas un jardin public, mais le carré (square en anglais) qu’une artiste conceptuelle a construit pour le musée dont le héros est le brillant conservateur.


 

On n’entrera pas dans le détail des désagréments qui vont lui advenir, d’ennuis minuscules - un téléphone dérobé - à des bouleversements existentiels définitifs, selon une progression joliment tracée (Snow Therapy s’articulait sur un même schéma). C’est l’antithèse de Rodin, un film sur l’exploitation et pas sur la création.
La description du milieu de l’art contemporain, au niveau élevé des institutions muséales, est assez réjouissante, entre postures, enjeux financiers et mécénat.

Avec tout de même des morceaux d’art véritable dans cette soupe - et si l’on nettoie le carré en question de la jargonite de sa présentation, on obtient une œuvre intéressante.

Östlund continue à pratiquer l’ambiguïté, la narration décalée - il traîne sur des détails, suspend une séquence pour enchaîner brutalement sur la suivante. Par exemple : un technicien de surface nettoie avec sa machine le sol entre les tas de graviers d’une installation, on craint le pire, on passe à autre chose pour en avoir des nouvelles par hasard vingt minutes plus tard.


 

Avec des points d’orgue, comme l’étonnante séquence, filmée en continuité, de la performance de Terry Notary au cours du banquet d’inauguration.


 


 

Séquence extrêmement dérangeante, comme sont dérangeantes la plupart des situations - rapports avec le gamin, rapports avec ses filles, rapports avec son assistant, rapports avec Elisabeth Moss.


 

Le désespoir est envahissant - rarement on a entendu autant appeler à l’aide dans un film, du début à la fin -, à peine masqué par une beauté visuelle constante, qui résonne parfois de la griserie du savoir-faire (un superbe travelling arrière en spirale dans un escalier monté quatre à quatre, alors que l’immeuble possède un ascenseur, ou l’invraisemblable tas de sacs-poubelle dans lesquels plonge le héros, quasiment une installation supplémentaire).

Problème, commun à nombre de films : on aurait souhaité que les 142 minutes soient mieux justifiées. Mais qu’y faire ?

Lucien Logette
Jeune Cinéma n° 381, été 2017

The Square. Réal, sc, mont : Ruben Östlund ; ph : Fredrik Wenzel ; mont : Jacob Secher Schulsinger. Int : Claes Bang, Dominic West, Elisabeth Moss, Terry Notary (Suède-Allemagne-Danemark-États-Unis, 2017, 142 mn).

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