Alors qu’elle mène en apparence une vie bien tranquille en Islande, entourée de ses proches, de la Nature et de sa sœur qui lui ressemble, Halla pourrait continuer à exister sans problème. Mais elle est une sorte de Jekyll and Hyde de l’écologie révolutionnaire, puisqu’elle se transforme la nuit en "Femme de la montagne", menant une guerre secrète contre l’industrie locale de l’aluminium.

La Semaine de la Critique nous propose un film léger pour dénoncer la violence que les industries font subir à la planète, répondant presque parfaitement aux diktats que les organisations font peser, quant à elles, sur le cinéma contemporain : féminisme, lutte contre les injustices, antiracisme, etc.

Pourtant le film de Benedikt Erlingsson, même s’il possède quelques maladresses et naïvetés, ne fonctionne pas de la sorte et se donne dans une sorte de simplicité sincère et revigorante. Quelle femme n’aimerait pas devenir la nuit une sorte de Zorro femelle pour faire sauter toutes ces lignes à haute tension, afin d’arrêter l’industrialisation qui menace une nature admirable ?

Mais un courrier vient brouiller les pistes et compliquer le militantisme de Halla, lorsqu’elle apprend qu’elle doit partir en Ukraine chercher la petite fille qu’elle a adoptée. Le film, qui n’a jamais été vraiment politique, passe alors de la comédie militante à une sorte de farce, qui met bien à jour les rouages ubuesques des gouvernements, tiraillés entre le respect des citoyens et l’application aveugle des directives mondialistes.

Un film féministe et réjouissant qui n’aura pas échappé à la sagacité du jury de la Semaine, présidé par Chloé Savigny, qui a reconnu son talent discret en accordant le prix de la SACD aux deux scénaristes du film.

Jean-Max Méjean
Jeune Cinéma n° 388-389, été 2018

Woman at War (Kona fei i strid). Réal, sc : Benedikt Erlingsson ; sc : Olafur Egill Egilson ph : Bergsteinn Björgulfsson ; mont : David Alexander Corno. Int : Halldora Geirhardsdottir, David Po Jonsson, Omar Gudjonsson (Islande-France-Ukraine, 2018, 101 mn).