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National Gallery (2014)
de Frederick Wiseman
publié le samedi 22 octobre 2016

par Bernard Nave
Jeune Cinéma n°360, été 2014

Sélection officielle de la Quinzaine des réalisateurs

Sortie le mercredi 8 octobre 2014


 


Après son merveilleux film sur l’Université de Berkeley (1), Frederick Wiseman pousse les portes de la National Gallery de Londres et nous offre une visite de presque trois heures que l’on aurait volontiers prolongée tant ce qu’il nous donne à voir est proprement somptueux.


 

Cela tient bien évidemment à la richesse des collections du musée londonien dans lesquelles Wiseman opère une sélection toute personnelle, où chacun trouvera son bonheur. Surtout, il filme les tableaux en créant un rapport intime avec les œuvres. La caméra ne zoome pas sur un détail, le cadrage est celui de l’œuvre la plupart du temps. On a rarement eu le privilège d’une telle intimité que la vision sur grand écran magnifie.


 

La dernière séquence donne littéralement à voir, à comprendre ce qui est au cœur de son travail. Il nous confronte à une série de portraits dans lesquels il privilégie les regards caméra sur des visages vieillissants : le cinéaste débusque la mort à l’œuvre tout en créant des moments d’immortalité, l’art n’étant que la recherche de cet absolu. C’est aussi l’affirmation souveraine que le cinéma doit se situer dans cette quête de la vérité du beau, que la caméra doit permettre au spectateur d’entrer en dialogue avec lui-même, avec ses émotions. Le cinéma de Wiseman - sa morale - est tout entier contenu dans cette séquence.


 

On connait les principes de son travail : ni voix off ni musique.
La visite de la National Gallery poursuit la grande exploration des institutions que le cinéaste visite depuis toujours. Le musée est le lieu de passage où il observe les postures, les regards des visiteurs. Un lieu vivant que le film met en lumière dans ses choix pédagogiques avec les guides, les conférenciers qui parfois maladroitement, tentent d’expliquer les œuvres.


 


 

Comme dans At Berkeley, Frederick Wiseman nous convie à des réunions où l’on discute du budget, de la stratégie à adopter en direction du public. Nous découvrons le travail de restauration des œuvres, les choix à opérer, la minutie d’artisans concentrés sur leur travail.


 

Nous retiendrons la séquence dans laquelle le responsable de la restauration d’une peinture équestre de Rembrandt montre aux visiteurs le tableau caché révélé par les analyses scientifiques. Et, dans le silence de leur solitude, nous voyons les employés qui travaillent sur les cadres. Magie des dorures, des ciseaux d’ébéniste. Un seul a le droit à la parole, devant un groupe de visiteurs, pour expliquer leur difficile travail et il ne trouve pas les mots pour en parler.


 

Pendant le tournage avait lieu la mythique exposition sur Leonardo da Vinci, celles sur le Titien, Turner et le Lorrain. Et la banderole d’écologistes montés sur le toit du musée.

Bernard Nave
Jeune Cinéma n°360, été 2014

1. At Berkeley (2013).


National Gallery. Réal, sc, mont : Frederick Wiseman ; ph : John Davey (USA-France, 2014, 173 mn). Documentaire.



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