Bethléem, conflit israélo-palestinien, 2004-2005 : Sanfur, adolescent fougueux et impulsif est informateur pour les services secrets israéliens. Il vit dans l’ombre de son frère Ibrahim, leader du Fatah, héros qui fait la fierté de la famille. Sanfur trouve difficilement sa place et oscille entre les deux camps. Il aide son frère dans certaines de ses missions, alors qu’il livre en parallèle des informations à Razi, son contact aux services secrets. Au fil des années, Razi, a su tisser un lien étroit avec lui, entre père et ami, conseiller bienveillant qui ne doute en rien de l’intégrité de son contact.

Les camps ne sont pas clairement identifiés de prime abord et les allers et venues des uns et des autres, leurs liens, restent vagues.
Yuval Adler ne cherche pas à éclaircir immédiatement la situation et nous entraîne au cœur du conflit, dans sa partie stratégique et dans la complexité des rapports entre les deux camps. On observe la fine barrière qui existe entre les deux, comment ils s’interpénètrent, comment l’un et l’autre se séduisent et se manipulent.

La même confusion existe au sein d’un même camp avec la dispute Fatah / Hamas autour de la dépouille du frère martyr, scène qui nous mène à constater l’isolement de ses acteurs et le manque de confiance entre membres d’une même faction. Sanfur se déculpabilise en n’étant ni réellement d’un côté ni de l’autre.

Le réalisateur ne prend à aucun moment parti pour l’une de ces positions. Les acteurs, presque tous non-professionnels dégagent une assurance et un charisme qu’il a très bien su capter. Les mouvements de caméra les embrassent parfois, au plus près de l’action, action qui ne se situe pas dans les images habituelles du conflit mais se concentre sur ceux qui dans l’ombre en contrôlent les rouages. Le film s’affranchit ainsi des clichés et s’articule autour d’un récit solide et prenant, centré sur des trahisons qui fatalement ne peuvent mener qu’à une impasse.
Un premier film justement repéré à Venise qui révèle un réalisateur et des acteurs prometteurs.

Laetitia Kulik
Jeune Cinéma n°358, mars 2014

Bethléem (Bethlehem). Réal : Yuval Adler ; sc : Y.A., Ali Wakad ; ph : Yaron Scharf ; mu : Ishai Adar ; mont : Ron Omer. Int : Tsahi Halevi, Shadi Mari, Hitham Omari, Michal Shtamler (Israël-Danemark-Belgique, 2013, 99 mn).