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Vertige des possibles (le) (2013)
de Viviane Perelmuter
publié le mercredi 6 mai 2020

par Gisèle Breteau Skira

Jeune Cinéma n°358, mars 2014

Sortie le mercredi 19 mars 2014


 


Curieux premier long métrage de Viviane Perelmuter, Le Vertige des possibles.
Dans Paris la nuit, une voix mélodieuse (celle de la réalisatrice) guide les pas indécis d’Anna (Christine Dory) sur les traces d’un passé, amoureux, déchiré, perdu.
Ce sont des bribes de pensées, des atmosphères reconnues, vestiges de mémoire, sentiment vague d’appartenance à un lieu, suivi d’immenses perceptions d’étrangeté, de fragilité, de perte de soi, d’errance.


 

Le texte prononcé est d’une grande beauté, les mots éclairent chaque pas d’une tonalité hasardeuse et incertaine, la caméra suit de près le corps d’Anna, frêle silhouette abandonnée dans la nuit. On pense à Wanda de Barbara Loden, où l’égarement et le désarroi sont aussi illumination et création. L’état de flottement d’Anna imprime un sens à sa quête, sa déambulation dans la ville sur les traces du souvenir et de l’empreinte laissée par les autres, à l’écoute de la moindre marque de leur passage et de la faille que celle-ci dessine en elle. L’intranquillité qu’elle atteint par la radicalité de son choix, lui permet aussi d’être libre et de rêver sa vie jusqu’aux limites des possibles.


 

Pas étonnant que parmi d’autres, ses compagnons de route soient Vincent Dieutre, François Barat et Bojena Horackova qui, chacun à leur manière, cherchent et réinventent un cinéma. Certains cadrages, dans la nuit noircie ou bleue électrisée transforment Paris en tableau expérimental, l’apparition récurrente des poissons filmés plein cadre ajoute un effet grouillant et surpeuplé, métaphore d’une foule d’individus anonyme et semblable, les lents travellings le long des canaux de Venise accusent la vision mélancolique étouffante parfois, tant elle est lourde de mémoire.


 

Un film à la lisière de l’essai, de l’expérimentation, de la narration fictionnelle et du documentaire, une œuvre d’auteur qui jaillit avec grâce dans le contexte du cinéma actuel conventionnel et formaté. La remarquable singularité du film réside dans le rythme du récit ponctué par la musique, fluide comme le sang qui irrigue le cerveau.

Gisèle Breteau Skira
Jeune Cinéma n°358, mars 2014


Le Vertige des possibles. Réal, sc, ph : Viviane Perelmuter ; mont : Isabelle Ingold et Marie-Pomme Carteret ; mus : Reno Isaac et Jean-Paul Dessy. Int : Christine Dory, Vincent Dieutre, François Barat, Marie Payen, Olivier Costemalle, Maxime Desmons, Liao Yi Lin, Bojena Horackova (Belgique-France, 2013,108 mn).



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