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Night Moves (2013)
de Kelly Reichardt
publié le mercredi 17 juin 2015

par Jean-Max Méjean
Jeune Cinéma n°359 mai 2014

Sélection officielle de la Mostra de Venise 2013

Sortie le mercredi 23 avril 2014


 


Le titre du film est emprunté à la chanson éponyme de Bob Seger et il étire son charme sur une BO envoûtante de Jeff Grace. Pour son cinquième long métrage, Kelly Reichardt, réalisatrice entre autres de Wendy & Lucy, (1) nous livre une petite merveille d’intelligence et d’émotion, qui pose des questions essentielles sur l’engagement politique et la manière de vivre l’écologie - ici, sous forme de ce qu’on pourrait appeler le terrorisme écologique, qui est, comme l’enfer, pavé de bonnes intentions.


 

Josh, interprété magnifiquement par Jesse Eisenberg, travaille dans une ferme biologique en Oregon. Il est écologiste, côté révolté. Avec lui, une jeune militante, Dena, interprétée sobrement par Dakota Fanning, et Harmon, personnage ambigu joué par Peter Sarsgaard, vont tenter l’impossible pour faire de leur vie un exemple pour la communauté des autres hommes.


 


 

Mais, par un retour de bâton prévisible, cet acte courageux et extrémiste va se retourner contre eux. En effet, si les multinationales, protégées par toutes les autorités, peuvent polluer sans aucune sanction, il n’en va pas de même pour les individus isolés qui les attaquent. Sans vouloir nous proposer de solution, la réalisatrice nous fait réfléchir sur ces façons d’agir, même si le film, déclare-t-elle, "ne porte aucun jugement sur ce qu’est une bonne ou une mauvaise action." Night Moves nous montre, comme dans une œuvre à suspens, les trois héros en train de préparer leur coup.


 

La réalisatrice reste continûment de leur côté - elle ne s’intéresse que très peu aux policiers et aux autres personnages. Sa narration est centrée sur les trois militants, puis sur Josh lorsque les deux autres seront hors champ. Leurs préparatifs font penser à ceux d’une équipe de cinéma préparant un tournage dans le plus grand secret. Comme le déclare Kelly Reichardt : "Je crois que tous mes films présentent ce parallélisme entre l’histoire racontée et le processus filmique. Mon équipe et moi, on est comme nos personnages, on travaille sans filet : si un problème survenait, tout le projet du film pourrait s’effondrer. Ici, le parallélisme réside dans les étapes concrètes d’un travail. Je montre tout ce que font mes personnages pour monter leur affaire et j’adore filmer cela, c’est-à-dire des actions très concrètes, des gestes basiques."


 

Des gestes basiques certes, mais qui induisent de grandes conséquences, qui les laisseront meurtris. On sort du film abattu, conscient de l’impossibilité de se révolter dans nos sociétés polluantes qui nous font mourir à petit feu, pour produire l’énergie qui nous permettra de vivre et enfin de mourir… No future semble dire ce film indépendant, à méditer.

Jean-Max Méjean
Jeune Cinéma n°359 mai 2014

1. Wendy et Lucy de Kelly Reichardt (2008), sélection officielle Un certain regard au Festival de Cannes 2008.


Night Moves. Réal, sc, mont : Kelly Reichardt ; sc : Jonathan Raymond ; ph : Christopher Blauvelt ; mu : Jeff Grace. Int : Jesse Eisenberg, Dakota Fanning, Peter Sarsgaard (USA, 2013, 112 mn).



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