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Parfum de femme (1974)
de Dino Risi
publié le lundi 25 avril 2022

par Hugo Dervisoglou
Jeune Cinéma en ligne directe

Sélection officielle en compétition au Festival de Cannes 1975.
Prix d’interprétation masculine pour Vittorio Gassman

Sorties les mercredis 24 septembre 1975, 16 juillet 2008, et 1er septembre 2021


 


Giovanni Bertazui, dit Ciccio, est un jeune militaire en permission. Il se voit mis à la disposition de Fausto Consolo, un capitaine aveugle et aigri voulant rejoindre Naples. C’est sur ce duo atypique, adjoignant un acteur d’allure poupin, Alessandro Momo, à la présence brute et élégante du quinquagénaire Vittorio Gassman, que repose Parfum de femme.


 

La puissance de ce classique provient, pour partie, d’une caractérisation ironique de ce couple : le jeune Ciccio est calme et brave, tandis que l’aigri Fausto est plus proche du sale gosse profitant de son handicap pour faire de sales coups à son entourage. L’aspect comique est parachevé par le sixième sens du capitaine, lui permettant de sentir l’odeur des femmes ou d’entendre les pensées de Ciccio.


 

Ce principe génère un humour cabotin, vivifiant, perdurant la plus grande partie du voyage des deux compères, dont le mystérieux but dynamise l’intrigue. L’intelligence du film consiste à transformer la légèreté de l’époque, celle de l’Italie des années 70, alors en pleine révolution sexuelle, en calvaire pour Fausto qui - la faute à son handicap - est dans l’impossibilité d’en jouir, frustration à l’origine de son comportement vulgaire, surtout envers les femmes, alors réduites à des objets de consommation.


 

Ce comportement contient en lui-même une puissante critique de la nouvelle société s’établissant, car exhibant, via le capitaine, tel un miroir déformant, son caractère superficiellement consumériste. Les déambulations de Fausto dans ce monde de jouisseurs sont aussi un prétexte à mettre en scène la situation précaire de couches populaires inscrites dans des décors baignés d’une lumière radieuse.
Donnant au film une allure de fausse carte postale, car pleine d’une dureté sociale négligée, voire oubliée, du fait de l’atmosphère du moment, il donne ainsi à Parfum de femme, par delà ses aspects solaires, une ambiance profondément mélancolique.


 

Cette mélancolie est toutefois atténuée par la dernière partie du film qui, en se resserrant sur la relation amoureuse entre Fausto et Sara (Agostina Belli), délaisse cet aspect sociétal au profit d’un sentimentalisme fleur bleue, accentué par une musique tendant alors, à la différence de la première partie, à accompagner cette relation, plus que de jouer du décalage entre les tubes de l’époque et l’allure de Fausto qui, dans son costume trois-pièces, semble sortir de l’Italie des années 50. Mais les qualités du film, à commencer par ses acteurs, demeurent, et ce souci est vite oublié, d’autant qu’il reste infiniment supérieur à son remake américain, le bien fade Temps d’un week-end. (1)


 

Parfum de femme offre un curieux mélange de légèreté et de sérieux, ce qui lui permet d’acquérir ce ton particulier balançant entre la comédie à l’italienne, qui avait fait florès, et le drame. Il est un classique du cinéma italien, une belle introduction à la gargantuesque filmographie de Dino Risi, comme l’opportunité de contempler l’immense talent de Vittorio Gassman. (2)

Hugo Dervisoglou
Jeune Cinéma en ligne directe

* Le film vient de ressortir en DVD & combo blu-ray, chez Tamasa.

1. Temps d’un week-end (Scent of a Woman) de Martin Brest (1992), avec Al Pacino, qui a remporté l’Oscar du meilleur acteur à la 65e cérémonie des Oscars en 1992 pour sa prestation dans le rôle de l’officier aveugle.

2. Cf. "Profession : acteur. Entretien avec Vittorio Gassman", Jeune Cinéma n° 90, novembre 1975.


Parfum de femme (Profumo di donna). Réal : Dino Risi ; sc : D.R., & Ruggero Maccari, d’après le roman Parfum de femme (Il buio e il miele) de Giovanni Arpino ; ph : Claudio Cirillo ; mont : Alberto Gallitti ; mu : Armando Trovajoli ; cost : Benito Persico. Int : Vittorio Gassman, Alessandro Momo, Agostina Belli, Moira Orfei, Torindo Bernardi, Franco Ricci, Elena Varonese, Stefania Spugnini, Vernon Dobtcheff (Italie, 1974, 103 mn).



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