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Milice, film noir (1997)
de Alain Ferrari
publié le mercredi 1er février 2017

par Jacques Chevallier
Jeune Cinéma n°247, décembre 1997-janvier 1998

Sortie le mercredi 10 décembre 1997


 


Succédant, le 1er janvier 1943, au Service d’ordre de la Légion des Combattants, la Milice de Joseph Darnand rassemble bientôt quelques 30 000 agents qui, pour leur propre compte ou pour celui des nazis, participent à la lutte contre les résistants et les maquis, ainsi qu’aux persécutions antisémites. Fer de lance de la collaboration, la Milice est issue des ligues ultra nationalistes des années trente et certains des 21 points de son programme ("pour le nationalisme", "pour la pureté française", etc.) se retrouvent aujourd’hui encore dans les thèses de l’extrême droite.


 

Les auteurs de Milice, film noir ont fort justement inscrit l’histoire de la Milice dans celle, plus vaste, de cette extrême droite française avec laquelle nous sommes loin, très loin, d’en avoir fini. Préparé par Bernard Cohn & Charles Chaboud, le film a été entrepris en 1995 et plusieurs fois retardé. Le sujet, certes, n’est pas tabou, mais - il faut le rappeler -, il n’avait fait l’objet alors que d’un seul travail historique : l’ouvrage de Jacques Delperrié de Bayac, co-auteur du film avec Alain Ferrari. (1)

Au demeurant, quelques images montrent des plaques commémoratives attribuant aux Allemands des meurtres de résistants commis par des miliciens "bien français". C’est par la confrontation de témoignages, de points de vue (résistants, parents de victimes de miliciens, comme Victor Basch ou Jean Zay, ex-miliciens) et d’images d’archives que cette histoire de la Milice est narrée et analysée.


 


 

Il s’agit d’une véritable enquête autour de faits connus (l’attaque du plateau des Glières, l’insurrection à la centrale d’Eysses, la tragédie de Saint-Amand-Montrond...) ou plus obscurs. Le film met en cause aussi le négationnisme de Léon Gaultier, l’un des fondateurs de la Milice, qui affirme "qu’on n’y parlait pas des Juifs" ou que le camp du Struthof, en Alsace, avait quelque chose d’un "hôtel" - mais le carton corrigeant cette affirmation est un peu sommaire et rapide pour répondre efficacement aux propos du vieux milicien.


 


 

Les auteurs se sont refusés au didactisme. Pourtant un commentaire explicatif aurait donné plus de clarté à certains épisodes relatés dans le film. Que sait-on aujourd’hui des GMR dont on signale qu’ils furent les premiers à être déployés pour encercler le maquis des Glières ?


 

Dans le film noir de l’Occupation, les miliciens furent en tête des auxiliaires des nazis, mais ils ne furent pas les seuls à les servir. Plus en vue que d’autres, ils furent aussi plus durement sanctionnés à la Libération. Mais, comme on le rappelle dans Milice, film noir, ceux qui sauvèrent leur tête - presque tous - furent rapidement libérés.

Jacques Chevallier
Jeune Cinéma n°247, décembre 1997-janvier 1998

1. Jacques Delperrié de Bayac, Histoire de la Milice (1918-1945), Paris, Fayard, 1969.


Milice, film noir. Réal : Alain Ferrari, Jacques Delperrié de Bayac, sur une idée de Bernard Cohn & Charles Chaboud ; ph. : Christian Garnier ; mont. : Didier Ranz (France 1997, 138 mn). Documentaire.



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