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Quelle heure est-il, Monsieur Réveil ? (1985)
de Peter Bacso & Tamas Tolmar
publié le vendredi 5 août 2016

par Daniel Guffroy
Jeune Cinéma n°361-362, automne 2014

Inédit en France


 

Pour saluer son cinquantenaire, Jeune Cinéma a posé une question à ses collaborateurs : Quel film des cent dernières années aimeriez-vous sortir de l’ombre ?
Ce film fait partie des hidden gem (re)découverts à cette occasion.


On ne s’étonnera pas que je choisisse un film hongrois, c’est avec le cinéma de ce pays que j’ai entamé mon partenariat avec Jeune Cinéma. Je veux rendre hommage à un réalisateur peu connu en France, sauf peut-être pour Le Témoin, (1) dont la distribution en Hongrie a longtemps été bloquée, avant d’être montré à Cannes. Il est mort en 2009, à 81 ans, après une longue carrière. Ce qui caractérise Péter Bacsó c’est de partir d’histoires simples, mais de parsemer le film de touches d’acidité qui donnent des notes d’humour. À une époque où la production cinématographique était encore surveillée, c’était un moyen de dérouter les censeurs potentiels.


 


 

Le héros de Quelle heure est-il, Monsieur Réveil ? n’est pas seulement horloger, il a l’heure en lui, il est l’heure. Cela ne l’empêche pas d’avoir des démêlés avec son épouse qui le harangue alors qu’il s’occupe de l’horloge de l’église. La conséquence est inéluctable : notre horloger va rendre hommage à Harold Lloyd, accroché à une aiguille.


 

Le sujet est situé (au moins officiellement) à une époque bien précise : celle où les Nazis envahissent la Hongrie, en mars 1944, ne trouvant pas leur alliée assez docile. Et notre horloger juif, qui n’avait pas jusqu’ici de problème avec son entourage, va connaître les rafles.


 


 


 

On enlève tout aux prisonniers, mais même sans montre, notre horloger a toujours l’heure en lui. Quand il la fait scander à ses compagnons d’infortune, la scène est remarquable et les Nazis sont perplexes. Car la connaissance de l’heure est absolument nécessaire à la réussite d’une action.


 


 

L’histoire du cinéma hongrois sous le régime communiste lié à la domination soviétique et l’œuvre de Péter Bacsó laissent la porte ouverte à une autre lecture : un régime dictatorial, quel qu’il soit, peut spolier, tuer. Mais il ne peut atteindre ce qui est au plus profond de nous-mêmes.

Daniel Guffroy
Jeune Cinéma n°361-362, automne 2014

1. Le Témoin (A tanú) de Péter Bacsó (1969) a été vu en Hongrie en séance spéciale en 1969, et n’est sorti en salles qu’en juin 1979, 10 ans après été sélectionné au Festival de Cannes 1969. Cannes Classics l’a présenté en 2019.
Péter Bacsó (1928-2009), réalisateur de 35 films entre 1960 et 2008, a été peu reconnu par le monde occidental (à San Sebastian en 1968, et à Locarno en 1972).


Quelle heure est-il, Monsieur Réveil ? (Hany az ora, Vekker ur ?). Réal : Péter Bacsó & Tamás Tolmár ; sc : P.B. & Géza Páskándi ; ph : Tamás Andor ; mont : Mihály Morell ; mu : György Vukán ; cost : Erzsébet Mialkovszky. Int : Tamás Jordán, Ferenc Kállai, György Melis, Ildikó Bánsági, Kornél Gelley, Zoltán Bezerédy (Hongrie, 1985, 93 min).



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