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C’est la vie (1980)
de Paul Vecchiali
publié le dimanche 22 janvier 2023

par Luce Vigo
Jeune Cinéma n°133, mars 1981

Sortie le mercredi 28 janvier 1981


 


C’est la vie serait par certains côtés le prolongement de Corps à cœur (1) : les personnages de la Muette se seraient trouvés poussés, comme une grande part de la population parisienne, vers la banlieue. D’où les retrouvailles avec ces personnages, mais dans de nouveaux rôles qu’ils jouent sur profil lointain d’une cité HLM et de son terrain vague, dans un contexte qui bascule sans cesse du factice au réel.


 

Le factice, d’abord, c’est une maison posée là, au premier plan, aux couleurs naïves sans nuances, une maison en dehors de laquelle on peut se glisser latéralement, pour faire des incursions dans le réel, ou dans le rêve, puis revenir pour continuer à "jouer" ce réel ou ce rêve.
Dans cette maison une femme est bien présente par ses attitudes, ses déplacements et surtout par sa parole. Car le film repose en grande partie sur la parole, insistante, volubile d’abord de Ginette qui raconte sa vie au téléphone à Rachat des Rangers de France-Expert, puis celle d’autres, voisins, amis, visiteurs qui créent la communication, ou la recherche de communication. Une parole souvent dure, nourrie de l’âpreté de la vie, des rapports humains.


 

Et c’est là que l’on retrouve le réel, par tout le contenu des discours tenus qui dit les interrogations d’une femme d’une trentaine d’année sur son avenir, avec ou sans mari, avec ou sans amant, réfugiée ou non chez la grand-mère avec les enfants - ces enfants dont tout le monde s’occupe sauf elle - qui dit les reproches sans détours de l’amie, Simone Barbès (Ingrid Bourgoin), les rêves de la gardienne (Hélène Surgère) qui se nourrit de la vie de la cité pour en faire un roman, la tendresse de l’amant, le décalage avec le mari, et la prise de possession de tout ce monde-là, de toute cette vie par les médias : radio, téléphone, incursion des journalistes.


 

Ce "cadre-écran", pour reprendre les termes de Paul Vecchiali, qui est la maison, est pris dans le scope, qui appelle les travellings, les entrées et les sorties comme au théâtre. Mais C’est la vie, ce n’est pas du théâtre, c’est du cinéma comme l’aime Paul Vecchiali, dont les bases mêmes sont les réalités de la vie actuelle, réalités dont on s’échappe par le rêve ou le jeu, un cinéma dont le plaisir même vient qu’il s’avoue pleinement être du cinéma, avec ses codes non dissimulés.

Luce Vigo
Jeune Cinéma n°133, mars 1981

1. "Corps à cœur" de Paul Vecchiali (1978), Jeune Cinéma n°121, septembre 1979.


C’est la vie. Réal, sc : Paul Vecchiali ; ph : Georges Strouvé ; mont : P.V. & Khadicha Bariha ; mu : Roland Vincent ; déc : Bénédict Beaugé ; cost : Nathalie Cercuel. Int : Chantai Delsaux, Jean-Christophe Bouvet, Cécile Claireval, Ingrid Bourgoin, Béatrice Bruno, Michel Delahaye, Denise Farchy, Hélène Surgère, Jacques Gibert, Liza Braconnier (France, 1980, 90 mn).



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