par Jean-Max Méjean
Jeune Cinéma en ligne directe
Sélection officielle du Festival international du film de Reykjavik 2024
Sortie le mercredi 18 juin 2025
Le film est sorti en Italie sous le titre La solitudine dei non amati, à savoir "La solitude de ceux qui ne sont pas aimés". Et c’est sans doute mieux que le titre original en anglais, Loveable, qui dit à peu près "Capable d’amour", tout en évoquant une marque américaine de vêtements féminins. En fait, le personnage central du film, Maria, incarnée par Helga Guren, n’est pas capable d’amour. Elle en est plutôt incapable, ou se pense incapable, et elle en souffre beaucoup. C’est cette situation que Lilja Ingolfsdottir essaie de montrer à l’écran pour son premier long métrage et ce n’est pas chose aisée. Pourtant le film est très réussi, et on en garde le souvenir, longtemps après l’avoir vu, preuve qu’il est de grande valeur. La réalisatrice dresse le portrait d’une femme épuisée à force de donner et ne pas sentir d’amour en retour.
Maria, jeune femme séparée avec déjà deux enfants, tombe un jour lors d’une soirée sous le charme du beau Sigmund, incarné par le séduisant Oddgeir Thune, et elle va tout faire pour le séduire. Lorsque ce sera enfin chose faite, ils auront deux autres enfants ensemble et, sept ans plus tard, leur relation battra de l’aile, si bien qu’ils seront obligés de consulter une thérapeute. Il se trouve que, devant l’insatisfaction grandissante de sa compagne devant leur relation, Sigmund l’accuse d’éprouver une colère intense et qu’il est nécessaire qu’elle consulte. Bien sûr, sans se remettre en question lui-même, non par machisme, mais parce qu’il se croit à l’abri de toute responsabilité dans leur liaison.
Particulièrement bien étudiée, l’action du film, toute en petites touches, fait le tour de tous les problèmes des relations de couple et cet aspect est particulièrement bien rendu, à la fois dans les tensions, les culpabilisations, notamment dans la scène où Maria rencontre sa mère, mais aussi dans les relations avec les enfants, même si le revirement de l’attitude de sa fille aînée aurait mérité un peu plus d’éclaircissement. Accompagné d’une musique quelquefois diégétique comme le bienvenu air de Jacques Brel, "Ne me quitte pas", qui se trouve être chanté en français par une femme dans la rue, tout le film participe à bien décrire le désarroi de celle qui croit ne pas savoir aimer. On se demande enfin ce que Lilja Ingolfsdottir n’a pas fait dans ce film, à part la lumière qui est due à Øystein Mamen, puisqu’on la retrouve à toutes les commandes : scénario, réalisation bien sûr, costumes, décors, et même le montage qu’elle a tenu à réaliser elle-même en tant qu’ancienne étudiante polyvalente à la London International Film School et à la Prague Film School.
Jean-Max Méjean
Jeune Cinéma en ligne directe
Loveable (Elskling). Réal, sc, ph, mont, déc, cost : Lilja Ingolfsdottir. Int : Helga Curen, Oddgeir Thune, Elisabeth Sand (Norvège, 2024, 101 mn).