par Jean-Max Méjean
Jeune Cinéma n°437-438, juin 2025
Sélection du Festival de Sant Jordi à Barcelone 2025
Sortie le mercredi 25 juin 2025
Ceux pour qui le disque le plus célèbre et le mieux vendu dans le monde reste en mémoire et les fait vibrer encore seront enchantés par ce film enchantant qui retrace justement l’histoire de cet événement. En effet, en 1975, Vera Brandes, une jeune femme de 18 ans, va défier les conventions, s’opposer à ses parents et prendre tous les risques pour réaliser son rêve : organiser un concert de Keith Jarrett à l’Opéra de Cologne. Son audace et sa détermination vont donner naissance à cet enregistrement mythique du 20e siècle, The Köln Concert. Voici, en couleurs et en péripéties haletantes, l’histoire de cette belle aventure.
Issue d’une famille très aisée de Cologne, avec un frère indolent et paresseux, Vera Brandes arrive, au début du film, sur un petit nuage, car elle vient d’assister à un concert de l’ancien pianiste de Miles Davis, Keith Jarrett. Encore sous le charme de ce génie méconnu, qui parcourt l’Europe dans une 4 L, conduite par son manager qui a du mal à joindre les deux bouts, Vera se voit refuser par son père la somme que demande l’Opéra pour l’accueillir, mais sa mère lui avancera la somme.
En fait, à partir de ce moment-là, le film devient un film d’apprentissage puisque, petit à petit, grâce à son enthousiasme et à son courage, Vera va parvenir à ses fins, non sans mal. On laisse le spectateur découvrir ce beau film, tout empli de la grâce de la création artistique et de la force de persuasion d’une groupie hors normes. Vera va plus loin, jusqu’à tenter de faire réparer le vieux piano quart de queue désaccordé Bösendorfer que l’Opéra a laissé sur la scène après une représentation de Lulu de Alban Berg. En effet, Keith Jarrett, bien qu’artiste fauché, n’accepte de jouer que sur un Bösendorfer Impérial. En fait, et comme pour prouver encore une fois l’apathie générale des services culturels où qu’ils soient, ce n’est qu’au moment où le pianiste s’installe enfin sur la scène que Vera découvre sous une bâche un Bösendorfer Impérial qui y somnole…
Vera Brandes était déjà bien connue à Cologne. Née en 1956, elle a 16 ans lorsqu’elle organise sa première tournée pour le jazzman britannique Ronnie Scott. En 1974, elle lance la série "New Jazz in Cologne", où se produisent notamment Oregon, Dave Liebman, le groupe Pork Pie composé de Charlie Mariano & Jasper van’t Hof, ainsi que le quartet de Gary Burton. Ce parcours hors du commun attire l’attention de Ido Fluk, cinéaste israélien passionné de musique, installé depuis de nombreuses années à New York, qui contacte son mentor et partenaire de production Oren Moverman : "On pourrait en faire un film incroyable !" Et c’est ainsi qu’est né, après bien des pérégrinations, Au rythme de Vera.
Jean-Max Méjean
Jeune Cinéma n°437-438, juin 2025
Au rythme de Vera (Köln 75). Réal, sc : Ido Fluk ; ph : Jens Harant ; mont : Anja Siemens ; mu : Hubert Walkowski & Stefan Ronconi ; déc : Jutta Freyer ; cost : Aleksandra Staszko. Int : Mala Emde, John Magaro, Alexander Scheer, Ülrich Tukur, Jordis Triebel Michael Chernus, Shirin Lilly Eissa, Enno Trebs, Susanne Wolff, Marie-Lou Sellem, Corey Johnson (Allemagne-Pologne-Belgique, 2025, 116 mn).