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Imago (2025)
de Déni Oumar Pitsaev
publié le mercredi 22 octobre 2025

par Sylvie L. Strobel
Jeune Cinéma en ligne directe

Sélection officielle de la Semaine de la Critique au Festival de Cannes 2025
Prix du documentaire L’Œil d’or

Sortie le mercredi 22 octobre 2025


 


Imago est le premier long métrage du cinéaste franco tchétchène, Déni Omar Rassoul Pitsaiev, né en 1986, après deux courts métrages, The Girl Who Plays a Game (2016), et Looking for Deni (2017), ce dernier film étant comme un prologue à ce long métrage qui le suit, sept ans plus tard. C’est le récit personnel d’un cinéaste qui se cherche à travers son histoire familiale. Sa famille, éparpillée à la chute de Grozny - détruite en 2000 par l’armée russe - s’est partiellement regroupée au Pankissi, enclave géorgienne frontalière d’émigration tchétchène depuis le 19e siècle.


 


 


 

Déni est né à la chute de l’URSS, son père s’est éclipsé tout de suite. Sa mère, musulmane pratiquante voilée, aimable et équilibrée, l’aurait bien appelé Rassoul, mais on ne lui a pas demandé son avis. En l’absence du père, ce sont les oncles ou les grands-parents qui décident. Déni était encore un encore enfant, lorsqu’elle elle avait émigré au Kazakhstan et n’est pas retournée à Grozny. Par l’entremise de Daoud, un cousin bien implanté, elle avait acheté dans la vallée de Pankissi un terrain, offert à Déni, manière de le ramener parmi les siens, tous acquis à sa réintégration dans la communauté tchétchène, y compris pour diluer cette rumeur que le Pankissi serait hospitalier aux djihadistes.


 


 


 

L’idée germe dans l’esprit de Déni Omar Rassoul Pitsaiev, de raviver ses racines, alors il part faire ce documentaire sur le Pankissi, retrouver sa famille, et ce cousin Daoud tellement fédérateur qu’il lui invente tout un passé local. Il apporte même un projet futuriste pour le fameux terrain, les plans d’une maison sur pilotis (pour limiter le risque d’être enfoui sous les décombres comme dans son enfance à Grozny). Sa mère le rejoint, malgré les cinq heures d’avion nécessaires. Et son père aussi (avec femme et enfants) qui se verrait bien responsable des travaux de la maison.


 


 


 

Pour le cinéaste, c’est peut-être l’essentiel, cette rencontre avec son père. Une vraie conversation, enfin : "Tu es venu, mais pourquoi nous as-tu laissés tomber ?". Et celui-ci répond "Mais c’est le contraire, c’est ta mère qui a disparu un jour, puis n’est pas revenue et elle aurait opposé un total barrage à mes projets de te retrouver et de m’occuper de toi, je ne savais pas où tu étais". Le séjour est riche et chaleureux. Ils mangent beaucoup. Les femmes s’entendent bien, des joyeuses babayagas, un garçon à la belle voix appelle à la prière, il y a 2 mosquées une salafiste progressiste et une soufiste de droite. Tout est familier entre eux, ils parlent la même langue. Mais de là à s’installer, dans cette société patriarcale, où on ne songe qu’à le marier…


 


 


 

Le film pourrait être anodin, et il ne s’agit pas d’un film autobiographique, mais d’une quête. Au départ, c’était un documentaire très écrit, par deux scénaristes (et trois consultants), et plus ou moins rejoué. Au centre du film, il y a une longue conversation entre Déni Oumar Pitsaev et son père, qu’il ne connaissait pas très bien, une séquence dont le cinéaste dit qu’elle est presque un court-métrage à l’intérieur du film. Il dit aussi que la scène est très différente de ce qui était prévu. Il pensait que son père serait très timide et parlerait très peu, alors que ce fut l’inverse. La conversation a duré deux heures, dont on n’a gardé que 15% au montage. "Ce qu’on écrit en amont, ça nous protège, ça nous prépare, mais il faut être capable d’accepter le réel tel qu’il est, et embrasser la générosité que les gens offrent à la caméra".


 


 


 

Le film a été tourné en 3 étapes : repérage en 2023, deux mois de tournage en juillet août 2024, et finition en octobre 2024.

Sylvie L. Strobel
Jeune Cinéma en ligne directe

Imago. Réal : Déni Oumar Pitsaev ; sc : D.O.P. & Mathilde Trichet ; ph : Sylvain Verdet & Joachim Philippe ; mont : Laurent Sénéchal & Dounia Sichov ; son : Marie Paulus, Joseph Squire, Hélène Clerc-Denizot & André Rigaut (Géorgie, 2025, 129 mn). Documentaire.



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