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Dégradé (2015)
de Tarzan & Arab Nasser
publié le mardi 26 avril 2016

par Jean-Max Méjean
Jeune Cinéma n° 366-367, été 2015

Sélection Semaine de la critique au festival de Cannes 2015

Sortie le mercredi 27 avril 2016


 


Le film commence comme une bluette dans un salon de beauté, avec son décor kitsch à la manière de l’Almodovar de Femmes au bord de la crise de nerfs et se termine dans un chaos assourdissant.

En 2014, alors que les frères Nasser commencent leur tournage, l’armée israélienne fait des milliers de morts à Gaza.
Mais ils ne changent pas leur projet qui consiste à nous offrir une fable sur les conflits internes et les déchirements de la population palestinienne. "En nous concentrant sur un conflit interne aux Palestiniens, déclarent-ils, nous avons essayé de nous émanciper de ce qu’on attend de nous, cinéastes palestiniens. Mais notre volonté d’émancipation a une limite, celle de la réalité…"


 

Dans ce coquet camp retranché au cœur de Gaza, des femmes de différents styles se côtoient : la patronne, émigrée russe avec sa petite fille, son employée amoureuse d’un combattant qui se promène avec un lionceau en laisse, une belle femme mûre et autoritaire (Hiam Abbass, toujours impeccable), une femme voilée et son amie débridée, une femme enceinte, etc.


 

Toute cette coterie est là pour se faire belle, se pomponner et s’empoisonner la vie. La future mariée se fait coiffer, assistée par sa mère et sa belle-mère et les vacheries en tout genre fusent en tout sens.
Tandis que crescendo, au dehors, le chaos des mâles s’installe, de plus en plus tonitruant, les femmes continuent à espérer.


 

C’est ici que le double paradoxe mis en place par les réalisateurs est intéressant parce que, d’une part, les femmes se font belles pour des hommes odieux qui ne méritent pas cet honneur et cet amour.
D’autre part, la haine se fait peu à peu plus prégnante dans le salon et les femmes ne se contentent plus de mots assassins, mais se battent réellement, comme au dehors.


 

Film métaphorique, Dégradé est une réussite dans l’outrance pour montrer, selon les propres mots des réalisateurs, que "Gaza est un petit coin de paradis au milieu d’un terrible merdier" !

Jean-Max Méjean
Jeune Cinéma n° 366-367, été 2015

Dégradé. Réal, sc : Tarzan & Arab Nasser ; ph : Eric Devin ; mont : Sophie Reine, Ayas Salman ; mu : Benjamin Grospiron. Int : Hiam Abbas, Maisa Abd Elhadi, Manal Awad (Palestine-France-Qatar, 2015, 84 mn).

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