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Olivier (l’) (2016)
de Iciar Bollain
publié le mercredi 13 juillet 2016

par Claudine Castel
Jeune Cinéma en ligne directe

Sortie le mercredi 13 juillet 2016


 


Lors de la réouverture du centre Pompidou, en janvier 2000, Maurizio Cattelan a exposé dans le hall un olivier planté dans un cube de terre. Un paradigme de la nature perdue, bella e perduta… comme le raconte autrement et de belle manière Pietro Marcello (1).
Iciar Bollain (2) et le scénariste Paul Laverty, eux, se sont inspirés d’un article de El Pais pour imaginer une histoire de famille qui tourne autour d’un arbre, dans l’engrenage de la récession économique de 2008 en Espagne. Iciar Bollain focalise le récit sur Alma, interprétée par Anna Castillo, avec "l’envie de questionner cette génération perdue, frappée de plein fouet par la crise".


 

Quand on déracine son olivier millénaire, un vieux paysan espagnol se réfugie dans l’oubli dont on ne revient pas. Pour 30 000 euros, le prix d’un arbre. Il va errant, tandis que sa petite-fille Alma se coltine un élevage industriel de poulets. Elle a l’énergie explosive de ses vingt ans, qu’elle retourne contre elle dans de brèves scènes qui trahissent le sentiment d’être mal dans sa peau. La tête pleine des souvenirs d’enfance avec son grand-père au pied de l’olivier et le chagrin qui déborde.

Alma dynamite les relations de famille (filmées en plans resserrés) en défendant l’aïeul et met à nu les choix de ses père et oncle qui ont joué la carte du béton et du tourisme contre l’(agri)culture. Avec l’aide de ses amies - "toi le cerveau, moi le culot et à toi l’élevage des poulets" -, elle embarque alors, au prix d’un gros mensonge, son oncle et son ami dans une folle équipée chimérique vers Düsseldorf en camion (flambant neuf). Elle veut négocier la restitution de l’olivier, décoration du hall d’une société en "énergies propres" qui en a fait son logo.


 


 

Aux paysages du Bajo Maestrazgo (près de Valence), constructions laissées en plan en bord de mer, survol des parcelles cultivées quadrillées de routes, succèdent les vues sur Düsseldorf, paysage urbain glacé loin de la chaleur du café ibérique. Le Rhin traverse souvent les plans comme une ligne de démarcation. La rencontre, via Facebook, entre le trio ibère et la jeunesse allemande, sous–entend aussi les clivages culturels.

Même si le fantôme de Don Quichotte - et ses incidences comiques dans certaines scènes - n’est pas loin, Alma s’est comportée sérieusement avec son rêve (3).
Iciar Bollain mise sur l’espoir ; l’amitié, la solidarité et l’amour sont des sources d’énergie pour se battre et résister. Rien de mièvre dans tout ça, grâce à la passion que traduit la vitalité de la langue espagnole et dont Stendhal se réclamait (4).

Claudine Castel
Jeune Cinéma en ligne directe

1. Pietro Marcello, Bella et perduta (2015) & La bocca del lupo (2009).

2. Iciar Bollain, Ne dis rien (2003) & Même la pluie (2010).
Le premier sur le thème de la violence faite aux femmes et le second, l’histoire d’une spoliation des ressources naturelles de tout un peuple.

3. "Il est naturel de rêver, mais il faut se comporter sérieusement avec son rêve". Lénine.

4. "J’aime de passion les Espagnols ; c’est le seul peuple qui ose faire ce qui lui plaît sans songer aux spectateurs", Mémoires d’un touriste, 1837.

L’Olivier (El olivo). Réal : Iciar Bollain ; sc : Paul Laverty ; ph : Sergi Gallardo ; mont : Nacho Ruiz Capillas. Int : Anna Castillo, Javier Gutiérrez, Pep Ambros, Manuel Cucala, Miguel Angel Aladren (Espagne-Allemagne, 2016, 100 mn).

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