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Ma’Rosa (2016)
de Brillante Mendoza
publié le mardi 29 novembre 2016

par Patrick Saffar
Jeune Cinéma n° 374, été 2016

Sélection officielle du festival de Cannes 2016.
Prix d’interprétation féminine pour Jaclyn Jose

Sortie le mercredi 30 novembre 2016


 


"J’aime l’idée que la pensée fonctionne comme un barrage et qu’en arrêtant le flot, le cours de l’intensité de vie dans notre corps, elle permet en fait de la ressentir. Et si ce barrage saute, si l’on n’est pas capable d’opposer de la pensée au flux de la vie, eh bien ce flux de vie finit par ne plus être sensible, par s’épuiser". (1)
C’est un peu ce que l’on ressent à la vision de Ma’ Rosa.
La pensée (qu’au cinéma, on peut aussi nommer "mise en scène") ne permet plus d’y endiguer ce flux d’images dans lequel nous plonge Brillante Mendoza.


 

Le dispositif immersif (pour reprend un terme à la mode), ininterrompu, a ici pour vocation de nous faire partager quelques heures de la vie de Ma’Rosa qui, dans un quartier pauvre de Manille, tient une épicerie avec son mari. On découvre assez vite qu’elle s’y livre également à un micro-trafic de narcotiques afin d’améliorer son quotidien. Arrêtée par la police, Ma’Rosa se retrouve confrontée à un état de corruption avancée, et incapable, par manque d’argent, de faire face au chantage exercé par les flics du commissariat. Elle en deviendra délatrice à son tour et, devant l’intransigeance de la police, ses enfants seront amenés, par divers biais (notamment la prostitution) à réunir la somme d’argent nécessaire.


 

Que la fiction du film corresponde à un état de la réalité philippine qu’il s’agit de dénoncer haut et fort, on n’en doute pas. Le problème est que, faute d’une juste distance (à défaut même de distanciation), on ne sait pas trop quoi penser des agissements de cette trafiquante au petit pied.

Dans un entretien récent, Brillante Mendoza a beau jeu de déclarer : "Ce genre d’histoire fait la une des journaux philippins tous les jours !". Là est bien le problème : que nous apporte ici le cinéma ? On se réserve d’y revenir.

Patrick Saffar
Jeune Cinéma n° 374, été 2016

1. Tristan Garcia, in Télérama n°3463, p. 53.


Ma’ Rosa. Réal : Brillante Mendoza ; sc : Troy Espiritu ; ph : Odyssey Flores ; mont : Diego Marx Dobles ; mu : Teresa Barrozo. Int : Jaclyn Jose, Andi Eigenmann, Julio Diaz, Mark Anthony Fernandez (Philippines, 2015, 110 mn).



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