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Top of the Lake (2012) (mini série)
de Jane Campion
publié le dimanche 18 décembre 2016

Cf. Automne 2013
Les saisons, chronique DVD

par Jérôme Fabre
Jeune Cinéma n°356, décembre 2013

Premières diffusions le dimanche 20 janvier 2013 (Sundance Channel) et le jeudi 7 novembre 2013 (Arte).


 


Je traite rarement, en ces pages, de séries, la grande affaire des années 2000, non qu’elles me répugnent mais parce que, si je n’ai certainement pas le savoir de certains sur le sujet, elles me laissent globalement indifférent. Je ne nie pas y trouver un certain plaisir, je pense notamment à, par ordre chronologique, The Wire, Battlestar Galactica, Treme, Walking Dead ou Homeland, mais ce plaisir naît uniquement du talent des scénaristes et de l’interprétation.

Car cinématographiquement parlant, c’est, si l’on excepte peut-être Rome, d’une pauvreté insigne, filmage à la truelle, montage à la tronçonneuse, et je ne comprends pas les bouffées de chaleur des uns et des autres, au-delà du désir patent de ne pas être un train en retard sur la mode du bobo (cf. l’engouement pour l’insipide Mad Men).

Plus d’attention est généralement portée au cinéma dans les mini-séries, ces feuilletons de six épisodes maximum, financièrement plus aisés, et généralement tournés par un vrai cinéaste.
Jane Campion est censément l’un deux. Elle a pourtant cet impérieux pouvoir de m’énerver, puis m’accabler, pour finalement m’endormir. Et si j’ai survécu, l’oubli du sommeil aidant, à ses pâtisseries en costume, j’ai failli ne pas survivre à Top of the Lake (*).

Heureux d’abord de retrouver les fabuleux paysages néo-zélandais qui ont baigné une partie de mon adolescence, j’ai dû vite me confronter à nouveau à ce cinéma foncièrement déplaisant, sexiste, divisé en deux mondes étanches, à ma gauche les hommes, rustres, obtus, uniquement mus par la dose de liquide qui doit régulièrement sortir de leur sexe ou entrer dans leurs veines, à ma droite les héroïnes hautaines et suprêmement intelligentes, donc choyées par la réalisatrice, qui m’apparaissent pour ma part comme des têtes à claques tout juste levées du divan ou sur le point de s’y allonger.


 

Dichotomie subtilement illustrée à l’écran avec d’un côté les repaires clos, grillagés, étroitement surveillés des raclures dealers ou pédophiles, de l’autre le campement bucolique et ouvert au monde d’une communauté féministe new age couvée par une gourou aux élucubrations absconses (Holly Hunter, pathétique).

Au milieu, part offerte à l’enfance, une pauvre gamine abusée au visage d’ange qui se retrouve enceinte à 12 ans.
On retrouve cette étrangeté forcée, artificielle, qui se voudrait lynchienne (Campion en appelle littéralement dans une scène à Blue Velvet), ces personnages fabriqués et caricaturaux qui grattent les plaies sales et remuent l’eau saumâtre du bocal avec délectation, pour la seule beauté du geste.
Ça parle de sexe sans relâche mais c’est sans chair, ça se vautre dans la fange, se gausse de la médiocrité des autres pour mieux oublier la sienne.
Et Elisabeth Moss, après Mad Men, confirme qu’elle est la pire actrice de sa génération.

Jérôme Fabre
Jeune Cinéma n°356, décembre 2013

* BBC.

Top of the Lake. Réal : Jane Campion et Garth Davis ; sc : Jane Campion et Gerard Lee ; ph : Adam Arkapaw ; mont : Alexandre de Franceschi et Scott Gray ; mu : Mark Bradshaw, Georgi Kay. Int : Elisabeth Moss, David Wenham, Peter Mullan, Holly Hunter, Jacqueline Joe, Robyn Nevin, Thomas M. Wright, Robyn Malcolm, Mirrah Foulkes, Calvin Tuteao, Sarah Valentine, Jay Ryan (Australie-États-Unis-Grande Bretagne, 2012, 350 mn).

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