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En attendant les hirondelles
de Karim Moussaoui
publié le vendredi 10 novembre 2017

par Gisèle Breteau Skira
Jeune Cinéma n° 382-383, automne 2017

Sélection officielle Un certain regard du festival de Cannes 2017

Sortie le mercredi 8 novembre 2017


 


En trois histoires, Karim Moussaoui évoque son pays, l’Algérie.
Situées dans des milieux sociaux différents, la bourgeoisie conservatrice, la classe moyenne et les laissés-pour-compte, elles sont le reflet de réactions propres à chacun face à la vie. Incertitudes et espérances dans une Algérie post-guerre civile, en proie à des situations inacceptables face à la liberté de penser où pèse encore la présence de l’islamisme radical. Dans la vie de chacun, prédomine un empêchement à vivre : l’aspiration des femmes se heurte au patriarcat et à un véritable rempart d’interdits, et, par instants, comme une soudaine prise de conscience de la liberté, la vie se transforme en rêve. Moments privilégiés où, sur les notes d’une cantate de Bach, quelque chose s’épanouit et suspend le temps.


 

Dans le bar d’un hôtel déserté, la femme, éduquée dans la tradition, s’émancipe, elle se met à danser, enchaînant les mouvements les plus suggestifs avec le jeune garçon qu’elle aime, celui malheureusement qu’elle n’épousera pas. Dahman, le médecin, quitte sa noce pour rejoindre une femme qu’il connut lors de la guerre et dont il fut témoin du viol ; il l’écoute, saisi par le repentir de n’être pas intervenu et le besoin d’être aux côtés de l’enfant né de ce crime. Dans une très belle scène compassionnelle, l’homme s’assied sur le sol à côté du gamin qui ne parle pas et crie comme un oiseau. Mourad, promoteur immobilier, assiste un soir au passage à tabac d’un jeune homme laissé pour mort sur le macadam. Il ne dit rien et rentre chez lui. Un cinéma du renoncement.


 

Dans son court Les Jours d’avant (2013), Karim Moussaoui faisait régner une mélancolie contenue.
L’impression est réitérée dans ce premier long métrage, où elle semble rythmée par une douceur poignante. Son cinéma témoigne de cet état de fait, de cette violence latente, comme du sentiment de détachement des individus. La ville, les terrains vagues sont filmés plutôt de nuit, dans des plans aux couleurs fortes, même faiblement éclairés. Hôtels plantés dans la rocaille désertés par les touristes, bâtiments et chantiers en arrêt, images de l’Algérie vues par Karim Moussaoui.
La démocratie arrivera avec les hirondelles.

Gisèle Breteau Skira
Jeune Cinéma n° 382-383, automne 2017

En attendant les hirondelles. Réal, sc : Karim Moussaoui ; sc : Maud Ameline ; ph : David Chambille ; mont : Thomas Marchand. nt : Mohamed Djouri, Sonia Mekkiou, Mehdi Ramdani, Hania Amar, Nadia Kaci, Aure Atika (France, 2017, 113 mn).

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