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Intrusa (l’) (2017)
de Leonardo Di Costanzo
publié le mercredi 13 décembre 2017

par Jean-Max Méjean
Jeune Cinéma n° 384, décembre 2017

Sortie le mercredi 13 décembre 2017


 


Originaire d’Ischia, Leonardo Di Costanzo vit entre Paris, où il enseigne aux Ateliers Varan, et Naples. Après plusieurs documentaires, il nous offre ici une fiction proche, très proche de la réalité. L’intrusa est un magnifique film qui pose la question de la culpabilité, de l’engagement et de la liberté, tous ces concepts qu’on a l’habitude de débattre en cours de philosophie mais qui apparaissent ici dans toute leur force.

Inspiré de faits réels, le film met en scène le conflit intérieur qui habite Giovanna, créatrice d’un centre communautaire récréatif dans un quartier défavorisé de Naples, lorsqu’elle héberge, dans une petite maison délabrée, un couple de camorristes avec leur bébé, au milieu des enfants auxquels elle propose, avec son équipe, des activités culturelles et artistiques.


 


 

Présenté comme une alternative à la logique mafieuse du quartier, son centre devient alors un lieu dangereux pour les parents qui y confient leurs enfants. La police doit intervenir pour arrêter le mari camorriste, qui a tué sciemment un des membres d’une famille du quartier. Du coup, la vie de Giovanna devient un enfer, partagée entre son rêve d’harmonie et la dure réalité de la vie, confrontée à toutes les réactions qui s’enchaînent : celles des parents, des enfants, de son équipe, de la police et surtout de cette intruse qui ne veut pas quitter la maison qu’elle lui avait proposée pour s’abriter.


 

Sans poser de jugements, et avec une précision de sociologue, Leonardo Di Costanzo avance dans la description d’une situation périlleuse qui va demander aux principaux protagonistes de faire preuve de sens pratique et surtout d’intelligence. Comment rester fidèle à ses idéaux pourrait être la question qui taraude ce film. Il dénonce la Camorra, mais ce n’est pourtant pas un film sur la mafia. Il montre la misère du quartier, mais ne jette l’anathème sur personne. Giovanna et son équipe sont les derniers liens qui permettent à cette barre de logements sociaux de rester debout et de continuer à vivre.


 

Bien sûr, lorsque "l’autre" apparaît, en l’occurrence la jeune et belle Maria, quasi mutique, magnifiquement interprétée par Valentina Vannino, elle va devenir l’objet de tous les rejets, souvent justifiés mais jamais bienveillants, comme si personne n’avait droit à une seconde chance.
Le réalisateur le souligne : "L’élément étranger qu’on perçoit immédiatement comme dangereux, voilà, me semble-t-il, un thème particulièrement présent dans les temps que nous traversons."


 

Certes, mais le problème ne peut pas être résolu par la simple bonne volonté d’une femme, à la fois déterminée et fragile. Raffaella Giordano, dans le rôle de Giovanna, porte le film sur ses épaules et incarne toute la force de la résistance dans un monde de plus en plus dur et impitoyable. Née à Turin, elle est une artiste, performeuse et danseuse notamment de la compagnie de La Fenice, créée par Carolyn Carlson. Elle a également travaillé avec le Wuppertal Tanztheater de Pina Bausch et son élégance apporte au film un supplément d’âme qui en fait tout le charme et la nécessité.

Jean-Max Méjean
Jeune Cinéma n° 384, décembre 2017

L’intrusa. Réal, sc : Leonardo Di Costanzo ; sc : Maurizio Braucci, Bruno Oliviero ; ph : Hélène Louvart ; mont : Carlotta Cristiani ; mu : Marco Cappelli, Adam Rudolph. Int : Raffaella Giordano, Valentina Vannino, Martina Abbate, Anna Patierno, Flavio Rizzo (Italie, 2017, 95 mn).

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