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Winter Brothers (2017)
de Hlynur Palmason
publié le mercredi 21 février 2018

par Nicole Gabriel
Jeune Cinéma n° 385-386, février 2018

Sortie le mercredi 21 février 2018


 


Winter Brothers est le premier long métrage du jeune Danois d’origine islandaise Hlynur Pálmason, qui se définit aussi bien comme peintre, sculpteur, auteur d’installations, que comme cinéaste. Son film a été remarqué dans plusieurs festivals, notamment à Locarno, où son comédien principal, Eliott Crosset Hove, a reçu le prix d’interprétation masculine.

La première scène, livrée en prégénérique, ressemble à une initiation : dans l’obscurité totale, des points lumineux apparaissent, se meuvent, dansent. On comprendra plus tard qu’il s’agit de lampes torches de mineurs. Des bruits de pas, des piétinements, des chocs mécaniques - un vacarme qui va crescendo - plongent le spectateur dans un univers opaque ayant ses propres règles.

Après l’introduction au monde souterrain, la réalité, que symbolise le blanc de la neige, est celle de la mine de calcaire, au fin fond du royaume du Danemark, et de son usine attenante. Un non-lieu peuplé d’ouvriers vivant dans des algecos, transportés en camionnette du dortoir au chantier.


 

Entre eux, curieusement, aucun signe de camaraderie, moins encore de solidarité. Des hommes, en bleu de travail délavé par le calcaire, passent, si semblables que l’on a du mal à les distinguer. Selon toute apparence, on ne trouve pas un seul étranger parmi eux. Manquent aussi les signes qui permettraient de situer le récit au présent -ordinateurs, téléphones portables, écrans plats. Appareils ménagers et machines sont d’un autre temps.

Mais ce monde a son marginal, Emil, un des deux frères justifiant le titre du film - l’autre n’apparaissant que furtivement dans une séquence de bagarre à la Caïn et Abel.


 


 

Alors que ses semblables se conforment à leur quotidien blafard, Emil explore les échappatoires de ce non-lieu. Il court dans la forêt, fréquente le seul commerce du coin, un gigantesque bric-à-brac d’articles d’occasion où il acquiert un fusil, repère la seule fille alentour. Subtilisant à l’usine des produits toxiques, il distille un schnaps maison qu’il écoule auprès de ses collègues. Ayant son petit caractère, Il cherche noise à tous et à chacun. Les choses se gâtent lorsqu’un ouvrier tombe gravement malade et que l’on incrimine le breuvage.


 

Constituée de courtes scènes reliées entre elles de façon impressionniste, de tableaux magnifiquement photographiés en camaïeux d’ocre et de gris-bleu par Maria von Hausswolff, la narration serpente et aborde différentes pistes. S’agit-il du portrait d’un anticonformiste ou celui d’un paranoïaque qui, se voyant entouré d’ennemis, est prêt à suivre la voie défrichée par Anders Behring Breivik ?
Ou bien celui d’une classe ouvrière déclinante ?
Toujours est-il qu’on distingue mal les scènes réelles de celles fantasmées ou rêvées par le protagoniste. Les tensions s’apaisent après le conflit du héros avec le contremaître de l’usine qui représente l’autorité. Mais, tout au long de la bande, la violence reste latente.

Nicole Gabriel
Jeune Cinéma n° 385-386, février 2018

Winter Brothers (Vinterbrode). Réal, sc : Hlynur Palmason ; ph : Maria von Hausswolff ; mont : Julius Krebs Damsbo ; mu : Toke Brorson Odin. Int : Elliott Crosset Hove, Simon Sears, Victoria Carmen Sonne, Lars Mikkelsen (Danemark, 2017, 100 mn).



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