Emily Beecham, actrice anglo-américaine, incarne Daphne, une jeune femme de 30 ans, égoïste et drôle qui travaille le jour dans un restaurant d’un quartier du sud de Londres, Elephant and Castle, et, la nuit, fréquente les pubs à la rencontre d’aventures d’un soir. Sa vie est ponctuée de ces errances nocturnes où elle se saoule.

À part quelques visites à sa mère, peu de personnes croisent sa vie, excepté le bien sympathique David (Nathaniel Martello-White), videur dans une boîte, et quelques collègues du restaurant qui semblent lui porter amitié et compassion. Un jour dans une épicerie, elle est témoin d’un braquage sanglant qui la confronte à la réalité. Daphne est égarée.

De très beaux mouvements de caméra l’accompagnent lorsque seule, au croisement de plusieurs rues, de carrefours débouchant sur d’autres voies et d’autres routes, elle semble totalement désorientée, ne sachant plus, ni où ni comment choisir une direction, hésitante et perdue comme l’est soudain devenue sa vie.

Par un curieux hasard, cette manière d’être à la fois sans cesse agitée et terriblement oisive incite le spectateur à suivre ses déambulations et réflexions. Le réalisateur parvient à construire un personnage féminin d’aujourd’hui, qui doit se débrouiller dans une métropole comme Londres, s’épanouir dans une vie d’adulte qui tarde à venir et qui, brutalement, face à un choc dramatique, va s’éveiller et comprendre le fonctionnement social. Daphne, malicieuse et clairvoyante malgré ses attitudes immatures qui frisent parfois le cynisme, réussit à donner une image d’une jeunesse vulnérable en quête de repères.

Ce premier long métrage du réalisateur britannique Peter Mackie Burns révèle un talent certain pour exprimer la psychologie des personnages et leurs comportements face à la vie.

Gisèle Breteau Skira
Jeune Cinéma n° 387, mai 2018

Daphne. Réal : Peter Mackie Burns ; sc : Nico Mensinga ; ph : Adam Scart ; mont : Nick Emerson ; mu : Sam Beste. Int : Emily Beecham, Geraldine James, Tom Vaughan-Lawlor, Nathaniel Martello-White (Grande-Bretagne, 2016, 88 mn).