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Première année (2018)
de Thomas Lilti
publié le mercredi 12 septembre 2018

par Jean-Max Méjean

Jeune Cinéma n° 390, septembre 2018

Sortie le mercredi 12 septembre 2018


Réalisateur atypique, puisqu’il est aussi, fait qui mérite d’être souligné, médecin généraliste, Thomas Lilti puise systématiquement son inspiration dans sa pratique parallèle.

Après le très remarqué Hippocrate en 2014, puis Médecin de campagne en 2016, voici donc Première année, avec, encore une fois, le talentueux Vincent Lacoste, auquel s’est adjoint le convaincant William Lebghil.

Cette fois, il ne s’agit plus de médecins en exercice, mais de deux étudiants de première année, la plus difficile (sérieux recul pour Vincent Lacoste, interne dans Hippocrate…), que tout oppose, leur origine sociale et leurs méthodes de travail, entre assiduité et j’menfichisme, dont le réalisateur va observer les échanges et l’amitié naissante.
Nourri dans le sérail, Lilti en connaît les détours, ce qui lui permet de jeter un regard sans illusions sur l’Université, ses absurdités, ses injustices, et la mécanique bien huilée mais aléatoire de la vérification des connaissances. Les scènes dans l’amphithéâtre ou dans les entrepôts transformés en immenses salles d’examen sont criantes de réalisme - on s’y croirait pour de bon - et de justesse. Tous ceux qui sont passés par là, médecine ou autre, éprouveront la même angoisse rétrospective.

Au départ, Antoine (Lacoste), de milieu modeste, triple sa première année. Il rencontre par hasard Benjamin (Lebghil), fils de médecin et d’universitaire, glandeur-type. L’amitié profonde qui va les lier ira même jusqu’au sacrifice - n’en disons pas plus.

La mise en place d’un duo antagoniste est un des classiques du théâtre et du cinéma et il fonctionne ici à la perfection, car les deux interprètes parviennent avec un naturel étonnant à entrer dans leurs personnages, parvenant à se soutenir dans ces moments éprouvants où l’on peut même presque perdre la raison.

"C’était important, déclare Lilti, de montrer qu’au milieu de cette épreuve, quelque chose de beau pouvait se créer. Le cœur du film c’est la relation entre Benjamin et Antoine. Le maître et l’élève. Sauf que les choses évoluent. Et pas forcément dans le sens où on l’attend. Il fallait qu’à l’écran, leur complicité soit évidente et immédiate. Ils se soutiennent, s’épaulent, vivent ensemble quelque chose de fort."

C’est tout à fait juste, et ce beau film réussi est une ode à l’amitié, celle qui transcende les rivalités de classe ou d’ambition pour parvenir au dépassement de soi. Saluons le réalisateur d’avoir su résister à la sempiternelle histoire d’amour qui aurait perturbé le propos.

Jean-Max Méjean
Jeune Cinéma n° 390, septembre 2018

Première année. Réal, sc : Thomas Lilti ; ph : Nicolas Gaurin ; mont : Lilian Corbeille ; mu : LoW Entertainment. Int : Vincent Lacoste, William Lebghil, Alexandre Blazy (France, 2018, 92 mn).



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