Curieux petit livre, venu d’une étrange maison d’édition, qu’un regard sur son site (1) révèle jeune et apparemment sympathique, en ce qu’elle se consacre aux à-côtés du cinéma d’une façon pertinente : "la découverte, l’accès aux courts et longs métrages rares ou méconnus, la valorisation des archives films et non-films".

Ce premier volume de la "Collection des films invisibles" s’intéresse aux titres disparus de la première période de Murnau : sur les cinq films traités, un seul, Die Austreibung, est postérieur à Nosferatu (1922). (2)

Les quatre autres, Der Bucklige und die Tänzerin, Der Januskopf, Abend, Nacht, Morgen, Sehnsucht, datent de 1920 et ont tous totalement disparu, alors qu’il reste encore quelques bribes de Der Knabe im Blau (1919), quelques secondes de Satanas (1919) et quelques minutes de Marizza (1920).

Pour chaque film choisi, une fiche technique, un synopsis développé, de courts extraits de presse - mais surtout une série de photogrammes superbes, le papier glacé se prêtant bien à la reproduction : Conrad Veidt dans Sehnsucht (1921) le jeune Wilhelm Dieterle dans Die Austreibung, dans des décors de Rochus Gliese, futur architecte de L’Aurore (1927).

Le livre est court, bien mis en pages et apporte un complément visuel fort utile aux quelques ouvrages fondamentaux sur Murnau, signés Lotte Eisner ou Charles Jameux. (3).

Le programme de l’année qui vient prévoit d’examiner les films muets de Renoir (Marquita) et certains titres inédits de la Nouvelle Vague, tels La Ligne droite (Jacques Gaillard), Le Reflux (Paul Gégauff) et La Ligne de mire (Jean-Daniel Pollet).

Bienvenue dans le club des amateurs de saveurs rares.

Lucien Logette
Jeune Cinéma n°350-351, printemps 2013

1. Il semble que la maison d’édition Pingouin masqué ait disparu en 2014.

2. L’Expulsion (Die Austreibung), date de 1923.

3. Lotte Eisner, F.W. Murnau, Losfeld, Le Terrain vague, Paris, 1964 ; réédition Éditions Ramsay, 1996. Charles Jameux, Murnau, Paris, Cerf, 2006.

Stéphane Pirot, Le Cinéma ruiné de F.W. Murnau - Les films perdus (1919-1923), Veigné, Éditions du Pingouin masqué, coll. des films invisibles, 2012, 72 p.