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Une grande fille (2019)
de Kantemir Balagov
publié le mercredi 7 août 2019

par Nicole Gabriel
Jeune Cinéma n° 395, été 2019

Sélection officielle Un certain regard, au Festival de Cannes 2019

Sortie le mercredi 7 août 2019


 


Le film de Kantemir Balagov, Dylda, platement traduit en français par Une grande fille, traite du sujet, jusqu’ici tabou, des "femmes de confort" qui ont accompagné l’Armée rouge jusqu’à Berlin, par principe réservées aux plus hauts gradés.


 

Dans un style classique hérité de Alexandre Sokourov, dont il fut l’élève, Balagov nous propose une superbe épopée aux accents tolstoïens et dostoïevskiens sur fond historique, qui commence à Leningrad à l’automne 1945.
La protagoniste principale, au prénom signifiant “Violette”, une grande perche aux cheveux blonds, infirmière et infirme comme le prince Mychkine de L’Idiot, est sujette à de graves crises d’épilepsie.


 

Sa compagne d’infortune, Macha, une rousse d’une grande beauté et très séduisante, a, comme elle, exercé durant le conflit le plus vieux métier du monde. Dylda élève l’enfant de Macha, né de père inconnu.


 

Comme on voit, le jeune cinéaste orchestre avec facilité les plus grands thèmes de la littérature russe - ceux de Guerre et Paix, Résurrection, L’Idiot, Crime et châtiment.
Les événements s’enchaînent sous la forme opératique. Nous est montré un bataillon féminin rouge chargé encore, en temps de paix, du repos du guerrier, des tâches les plus humbles aux plus tragiques.


 


 

Le passé sordide des deux héroïnes est imprescriptible.
L’une s’autoflagelle ou somatise avec des manifestations d’absence et des perturbations épileptiques ; l’autre tente d’avoir un deuxième enfant et, en misant sur ses appâts, d’obtenir un statut social.
Malgré une esthétique un peu byzantine et une symbolique par trop appuyée, le film est d’une rare justesse. Il relit le passé autoritaire de l’URSS et le relie au présent, pas moins despotique sous des apparences plus policées. Le spectateur est captivé par l’intensité du récit, son lyrisme, la chatoyance des images.


 


 

Un deuxième thème prend le relais de l’histoire avec un grand “H”, c’est celui, underground, de l’amour entre deux femmes.

Nicole Gabriel
Jeune Cinéma n° 395, été 2019


Une grande fille (Dylda). Réal, sc : Kantemir Balagov ; sc : Alexandr Terekhov ; ph : Kseniya Sereda ; mu : Evgueni Galperine. Int : Viktoria Miroshnichenko, Vasilisa Perelygina, Timofey Glazkov, Andrey Bykov (Russie, 2019, 137 mn).



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