Le premier film de Annabelle Attanasio explore les relations épineuses d’un père (the Bear) du point de vue de sa fille, Mickey.

Belle, forte, capable de révolte, la jeune fille partage son temps entre un atelier de taxidermie et le lycée. Elle déploie son énergie à "materner" Hank, un vétéran démoli par la guerre d’Irak, accro aux opiacés. Payer les factures, tenir le mobil-home, se bagarrer avec la psychiatre pour une ordonnance d’oxy. Dans cette abnégation gît sa ligne de faille.

L’avenir dans une petite ville pauvre du Montana, tel que l’envisage son petit ami, ressemble à un enterrement de toute espérance. Elle noue une idylle avec un nouvel élève musicien qui la convainc de s’inscrire à l’université. Après une crise de jalousie dévastatrice de Hank qui le voit comme un intrus, elle le laisse s’éloigner, prisonnière du double bind.

Deux scènes en écho mettent à nu la virilité prédatrice s’emparant du corps féminin. La première, filmée à distance dans une voiture, semble exprimer la résignation triste de Mickey et prélude à la dernière, glaçante.

Annabelle Attanasio met en scène sans pathos l’irruption de la violence, répercussion des désastres de la guerre, broyeuse d’hommes et avec eux, de leur famille. Elle évite les écueils d’une trajectoire prévisible.
Sa direction d’acteurs révèle la belle interprétation émouvante de Camila Morrone et de Calvin Demba. La performance de James Badge Dale, terrifiant et pathétique, est saisissante.

Claudine Castel
Jeune Cinéma n°395, été 2019

Mickey and the Bear. Réal, sc : Annabelle Attanasio ; ph : Conor Murphy ; mont : Henry Hayes ; mu : Angel Deradoorian & Brian McOmber ; cost : Lucy Hawkins. Int : Camila Morrone, James Badge Dale, Calvin Demba, Ben Rosenfield, Rebecca Henderson (USA, 2019, 89 mn).