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JC n°401- été 2020

publié le jeudi 18 juin 2020

JEUNE CINÉMA n°401, été 2020

Couverture :
Sophia Loren, Charles Boyer, La fortuna di essere donna (Alessandro Blasetti, 1955)

Quatrième de couverture :
Éloge du pré-code. Roy del Ruth (1893-1961) au Festival Lumière 2019.

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ÉDITO JC n° 401, été 2020

 

Les pandémies ne sont pas une invention moderne, mais leur résister en arrêtant toute activité est inédit. Une planète tout entière suspendue un trimestre durant, c’est là une figure pré-apocalypse que les films de science-fiction n’ont guère illustrée, préférant jouer sur l’après. On verra comment l’imaginaire des scénaristes rendra compte de cette étrange période.
Gébé avait annoncé, en 1971, un An 01. Si la première partie du sous-titre de sa bande dessinée ("On arrête tout") a été appliquée, la seconde ("Et c’est pas triste") demande encore à l’être. Ce temps ne fut ni triste ni joyeux, il fut autre. Il a fallu s’habituer à un monde séparé, dans lequel le virtuel est devenu le maître des espaces, expérience jamais vécue. De quoi alimenter une décennie de recherches pour sociologues, statisticiens, psychologues (et psychiatres). Et historiens de cinéma.

Car le cinéma a connu lui aussi du jamais-connu.
Outre l’arrêt des tournages, la distribution des vingt nouveaux films hebdomadaires a brutalement cessé. Il y a belle lurette qu’on s’inquiétait de cette course folle conduisant tant de produits à l’abattoir, mais on ne souhaitait pas une telle Bérézina. Car le massacre, au lieu de se faire après la sortie, s’est accompli avant : combien, parmi les centaines de titres prévus entre mars et juin, ne verrons-nous jamais ? Combien de ces "petits" films indépendants qui sont notre pâture auront disparu corps et biens ? Des solutions ont été proposées - report, projection en e-cinéma, passage direct sur des sites... - le dernier éditorial de Sight & Sound a trouvé une jolie formule : "Le génie est sorti de la bouteille VOD" - dans un grand désordre improvisé.
Mais quels spectateurs ont été avertis de cette distribution sauvage ? Quels titres et sur quels supports ? Les "Actualités" de ce numéro reflètent cette incertitude : lesquels, de ces films chroniqués, ont été accessibles, le sont encore, le seront à la fin du mois de juin, lorsque les salles rouvriront ?

Quant aux festivals, la débâcle est complète.
Cannes n’avait jamais été annulé. Cette fois-ci, la sélection, bientôt annoncée, devrait accorder un label aux films retenus afin qu’ils en fassent état lors de leur sortie future - et peut-être d’autres modalités seront-elles envisagées avec des festivals plongés dans le même marasme. Cet été, qu’en sera-t-il de Locarno et de Venise ? Et notre cher Il Cinema Ritrovato de Bologne, repoussé vers on ne sait quelles dates ? (1)
Une année sans Croisette ni piazza Maggiore… Une nouvelle qui nous console (un peu) : le festival de Pordenone annonce que ses Giornate del Cinema Muto auront lieu en octobre 2020, du 3 au 10, online. Un film sur un écran domestique, ce n’est jamais très satisfaisant, mais c’est un moindre mal que pas d’écran du tout. Les lecteurs alléchés découvriront, le moment venu, sur le site du festival, les procédures d’accès aux merveilles muettes du cru 2020, pas encore dévoilées.
On se réjouit de cette occasion offerte de profiter d’un festival sans avoir à se déplacer. Mais le ver est dans le fruit. Puisque c’est possible, pourquoi ne pas généraliser la pratique ? La Berlinale à la maison, plutôt que dans l’hiver allemand ? Et La Rochelle, sans files d’attente ? Le public a découvert qu’il pouvait avoir accès aux films nouveaux immédiatement, en passant outre la chronologie habituelle des médias - pour moins cher et sans bouger, sinon d’une chaise vers un canapé. Consommation paresseuse, certes, qui efface le plaisir collectif, mais tentante, à l’abri des mâcheurs de pop-corn et des envoyeurs sauvages de textos.
Alors, lorsque les cinémas reprendront vie, les spectateurs sauront-ils retrouver le chemin qui y mène ? Pas de problème pour les usines à vingt salles, mais les indépendants, les défenseurs de l’Art & Essai qui arpentent des sentiers sans super-héros ni blockbusters ? L’avenir le dira rapidement. On peut craindre le pire, même s’il n’est jamais sûr.

Jeune Cinéma a depuis longtemps choisi de ne pas dépendre prioritairement du cinéma qui se fait. "L’actualité, ça ne se suit pas, ça se crée", la phrase de Jean George Auriol que le site de la revue affiche en exergue est plus que jamais valable. Ce printemps nous a placés hors du temps, profitons-en.
Et Bo Widerberg n’est-il pas en pleine actualité, puisque Malavida ressort, dès le 24 juin 2020, six de ses films, qui vont du Péché suédois à Joe Hill, tous traités dans la première partie de l’étude de Gérard Camy de notre numéro de printemps et dont la deuxième partie est à ce sommaire d’été.
Quant à Alessandro Blasetti - la lettre B de la trilogie ABC inaugurée par Jean A. Gili - et à Roy Del Ruth, découverte du dernier Festival Lumière évoquée par Philippe Roger, ils nous semblent aussi vivants que bien des réalisateurs contemporains ; il suffit de regarder leurs films, disponibles en DVD.

Les murs de la revue sont trop étroits : c’est seulement dans le prochain numéro (double), que paraîtra la seconde partie du dossier Gérard Mordillat, trop copieuse pour figurer cette fois-ci. Tout comme bien d’autres articles en attente, qui remplaceront le non-compte rendu de Cannes, une première depuis 1965.
Ainsi que les recensions des livres reçus durant ce trimestre sans librairies - livrons quelques titres au hasard : Michelangelo Antonioni (Jacques Demange), Les Nuits de Cabiria (Dominique Delouche), La Cinémathèque-musée (Stéphanie E. Louis), en attendant Les Lumières de Lhomme (Luc Béraud).
Tous peuvent, d’ici septembre 2020, être lus en confiance, sur des plages redevenues "statiques" - ou à l’abri des ventilateurs, si la canicule est à l’heure. Bel été tout de même.

Lucien Logette

1. Il Cinema ritrovato devrait avoir lieu à Bologne du 25 au 31 août 2020.

P.S. Luna Park Films et Tamasa annoncent la sortie, le 10 juin 2020, de la version restaurée de L’Écume des jours (1968) de Charles Belmont (cf. Jeune Cinéma n°229, octobre 1994), bien plus pertinente que l’adaptation récente (2013) de Michel Gondry. Compte rendu dans le n° 402-403.


 

SOMMAIRE JC n°401, été 2020

 

Patrimoine
 

* 1946 : Premier Festival de Cannes, par René Prédal.
* Alessandro Blasetti, un cinéaste pour toutes les saisons, par Jean A. Gili
* Bo Widerberg, l’autre Suédois… II, par Gérard Camy.
* Éloge du pré-code : Roy Del Ruth au Festival Lumière 2019, par Philippe Roger.
* 1940 : le cinéma français aux prises avec l’Histoire, par René Prédal.
* Inferno épisode 23 : Une sourde machine de guerre , parJean-Paul Combe & Vincent Heristchi.

Festival
 

* Festival du Premier Film d’Annonay 2020, par Jean-Max Méjean.

DVD
 

* Glanures, de Georges Lautner à Jérémy Clapin, par Philippe Roger.
* Chronique de l’été 2020, par Jérôme Fabre.
* Les Délices du confinement, Piotr Kamler, Mike Leigh, Thierry Aguila, par Robert Grélier
* Variétés, Eduardo Muliarga, Saul Bass, Marcel L’Herbier, par Nicole Gabriel & Nicolas Villodre.

Divagations
 

* Du récit au circuit : L’écologie diabolique du recyclage cinématographique, par Louis Lopparelli.
* Cinéma et coronavirus, par René Prédal.

Cinéma et Peinture
 

* Toute la mémoire du surréalisme XIII : Roberto Matta, par Robert Grélier.

Actualités
 

* Playing Men, par Gisèle Breteau Skira.
* Take Me Somewhere Nice, parGisèle Breteau Skira.
* The Great Green Wall, par Gisèle Breteau Skira.
* The Room, par Jean-Max Méjean
* À cœur battant, par Gisèle Breteau Skira.
* Le Défi du champion, par Jean-Max Méjean.
* Green Boys, par Gisèle Breteau Skira.
* Le Feu sacré, parr Gisèle Breteau Skira.
* Madre, par Jean-Max Méjean.
* Je voudrais que quelqu’un m’attende quelque part, par Gisèle Breteau Skira.
* Cancion sin nombre, par Gisèle Breteau Skira.

Nécrologie
 

* Christophe et le cinéma, par René Prédal.

Humeurs
 

* Baisse de forme ou baisse de fond ?, par Bernard Chardère.


JEUNE CINÉMA n°401, été 2020



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