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Green Boys (2019)
de Ariane Doublet
publié le lundi 22 juin 2020

par Gisèle Breteau Skira
Jeune Cinéma n°401, été 2020

Sortie le lundi 22 juin 2020


 


La Normandie inspire Ariane Doublet, elle y a tourné la plupart de ses films, dont le récent Green Boys qui obtient le prix Marcorelles au Cinéma du Réel en 2019. Militante de l’association Des lits solidaires, comme le réalisateur Pierre Creton (1), elle filme la naissance d’une amitié entre deux garçons, Alhassane, un migrant guinéen de 17 ans, et Louka, un enfant de 13 ans d’un village normand. Pour chacun des deux, l’enfance et la vie n’ont rien en commun.


 

La structure fragmentée du film assemble et confronte des moments de vie, filmés au présent, à l’écoute du silence de la nature, des chants d’oiseaux et des voix de l’un et l’autre des garçons, évoquant la peur de la nuit ou l’existence du Diable.
Par ailleurs, un autre présent se développe et s’immisce au montage, sorte de portrait en creux du seul Alhassane, d’images rythmées par sa voix off, décrivant son départ de Guinée, un matin, à l’aube, sans revoir sa mère puis son arrivée et son accueil en France.


 

La narration mêle ainsi, en continu, le présent au passé, dans un temps qui s’écoule lentement, avec douceur. Leurs voix se perdent parfois, presque inaudibles, mais peu importe, seule compte l’attachement fraternel qui croît entre eux, Louka le plus jeune cherchant auprès d’Alhassane, l’enseignement et la protection d’un grand frère.
Ensemble, ils grimpent aux arbres, contemplent la nature, puis, comme tous les enfants, construisent une cabane. Alhassane s’investit avec ardeur dans ce projet et fabrique inconsciemment, une hutte traditionnelle guinéenne, forme ronde et toit de chaume. Plus tard, alors qu’il marche nonchalamment, sous le soleil au zénith, un sac de jute sur la tête, Summertime, la chanson de Gershwin chantée par Sarah Vaughan, lui parvient, comme la berceuse que devait lui chanter sa mère.


 

Ariane Doublet, avec délicatesse, réussit à créer le sentiment d’intégration, mêlant par le geste, l’attitude et la présence des protagonistes, la double identité, française et guinéenne. Pudeur, réserve, discrétion et admiration se croisent et s’expriment dans un film essentiellement sensoriel où la présence du réel, le frémissement des feuilles sur les arbres, le ramassage des joncs sur le sable, ou encore les ombres fabriquées sur les visages, réunissent les deux garçons dans le même futur.

Gisèle Breteau Skira
Jeune Cinéma n°401, été 2020

1. Le Bel Été de Pierre Creton (2019) traite un thème assez proche. Ariane Doublet figure dans la distribution, avec notamment Mathieu Amalric et Nicolas Klotz.


Green Boys. Réal, sc, ph, mont : Ariane Doublet ; mont : Sophie Mandonnet (France, 2019, 71 mn). Documentaire.



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