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Acrobate (l’) (1976)
de Jean-Daniel Pollet
publié le mercredi 9 septembre 2020

par Andrée Tournès
Jeune Cinéma n° 95, mai-juin 1976

Sorties les mercredis 10 mars 1976 et 9 septembre 2020


 


C’est une histoire sympathique que raconte Jean-Daniel Pollet dans L’Acrobate  : celle d’un garçon de bains-douches à qui manque l’argent nécessaire pour coucher avec Fumée, la prostituée d’en face. Elle le fait bien parfois gratuitement pour qui la séduit, mais pour cela, le baratin ne suffit pas : "C’est pas ce qui la fait fondre", il y faut quelque chose de spécial, un truc, quoi ! Et Léon, avec sa drôle de gueule, sa taille menue, sait bien ne pas l’avoir.


 


 

Le knack de Léon, ça va être le tango, le vrai, l’argentin, celui qui fait plus sexe. De leçon en leçon, de compétitions en championnats, Léon devient roi du tango et amant de Fumée. Sur ce thème de conte de fée, Jean-Daniel Pollet a tourné un film ironique et délicat, en demi-teintes, dont l’atout premier est Claude Melki. Il a la mimique des grands acteurs du cinéma muet, le visage immobile aux grands yeux de Buster Keaton, l’agilité de Charlot dévalant un escalier avec un verre plein en équilibre sur un plateau. Il y a aussi quelque chose de leurs personnages dans celui de Léon, un petit brimé par les fiers-à-bras du Bains-douches, qui conquiert sa belle à force de ténacité.


 


 

Son personnage n’est jamais pitoyable, n’appelle pas la condescendance. Dès les premières scènes où il apprend à maîtriser les figures compliquées du tango, on le sent capable de transformer les sinistres couloirs de l’établissement en palais de comédie musicale. Claude Melki a appris le tango en cours de tournage et l’euphorie que dégage le film est due à la lente appropriation d’une technique qui métamorphose en même temps l’acteur et le personnage.


 

Si le film de Jean-Daniel Pollet n’est pas seulement une comédie porteuse de rêve, c’est qu’il a tourné dans le milieu réel des petites salles de quartier, celui des compétitions un peu minables, un monde clinquant et en toc qui rappelle celui des foires.


 


 

Les leçons se déroulent chez Georges et Rosy, qui jouent leurs rôles de professeurs de tango et parlent avec passion de leur art. D’où ce poids de réalité et de naturel qui équilibre le côté farfelu et lunaire de l’histoire. Un petit chef-d’œuvre en mineur.

Andrée Tournès
Jeune Cinéma n° 95, mai-juin 1976


L’Acrobate. Réal, sc : Jean-Daniel Pollet ; sc : Jacques Lourcelles ; ph : Alain Levent ; mont : Suzanne Baron ; mu : Antoine Duhamel. Int : Claude Melki, Laurence Bru, Guy Marchand, Marion Game, Micheline Dax, Édith Scob, Georges et Rosy (France, 1976, 101 mn).



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