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À mort l’arbitre ! (1984)
de Jean-Pierre Mocky
publié le mercredi 4 mai 2022

par Alain Caron
Jeune Cinéma n°158, avril 1984

Sortie le mercredi 22 février 1984


 


Pas plus tard qu’aujourd’hui, les supporters anglais ont joué de la hache et de la barre à mine à l’occasion d’un match de football. Certes, les mauvais sujets viennent des îles britanniques, mais la violence gratuite n’a pas de nationalité déterminée. Les Anglais font preuve d’un excès permanent, tandis que les Français mettent moins de constance dans leurs actions d’éclat.


 

Toutefois, la brochette d’imbéciles malheureux dépeinte par Jean-Pierre Mocky ne dépareillerait pas un car de hooligans dopés à la bière. Ils sont velus, ils sont tous là nos primates du ballon rond : braillards, alcoolos, méchants et grégaires, ils appartiennent à cette France des beaufs si chère au cœur de Cabu. Pour un pénalty contestable, la meute décide de lyncher l’arbitre, mais le règlement de compte tourne mal et un supporter vindicatif perd la vie sous les coups malencontreux d’un collègue de chopine. L’arbitre devient aussitôt le bouc-émissaire et celui que les mécontents souhaitaient mettre à poil devient un gibier à étriper d’urgence.


 


 

Pour limiter les dégâts, Jean-Pierre Mocky endosse un imper de flic, l’inspecteur qu’il incarne inspire plutôt la sympathie et son attitude blasée laisse entendre que les cons sont des victimes. Cette connerie humaine est tellement énorme que le réalisateur n’hésite pas à utiliser le fantastique pour reculer les limites du réel comme en témoigne la fantomatique poursuite finale, ou encore le mutisme des locataires d’une HLM de standing pendant qu’un supporter découpe une porte au chalumeau, encouragé par le chœur de ses camarades.


 

La réalisation approximative correspond bien au sentiment d’amertume que nous communique le film. Outre le constat d’une violence gratuite, il nous amène à nous interroger sur le besoin viscéral qui pousse les hommes à de telles flambées de haine. Le propos du réalisateur n’est pas de philosopher sur le fond de la nature humaine, mais plutôt de la montrer en action dans le contexte glacial de notre monde urbain.
Avec À mort l’arbitre !, l’humour de Jean-Pierre Mocky perd son côté grinçant pour endosser la couleur sombre de la désespérance.

Alain Caron
Jeune Cinéma n°158, avril 1984


À mort l’arbitre ! Réal : Jean-Pierre Mocky ; ph : Edmond Richard ; mont : J.P.M. & Catherine Renault ; mu : Alain Chamfort ; cost : Laurence Lévy, Monique Tourret & Véronique Villanova. Int : Michel Serrault, Eddy Mitchell, Carole Laure, Claude Brosset, Laurent Malet, Jean-Pierre Mocky, Géraldine Danon, Sophie Moyse, Nathalie Colas, Dominique Zardi (France, 1984, 82 mn).



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