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Félix et Meira (2014)
de Maxime Giroux
publié le mercredi 4 février 2015

par Jean-Max Méjean
Jeune Cinéma en ligne directe

Sélection officielle du festival de Toronto 2014

Sortie mercredi 4 février 2015

Jeune Québécois de Montréal, Maxime Giroux a réalisé une centaine de clips et deux longs métrages, Demain en 2008 et Jo pour Jonathan en 2010, récompensé dans de nombreux festivals, dont celui de Locarno.

Il est une preuve vivante de l’extrême vitalité du cinéma québécois. Sa dernière réalisation est un film "sur le courage de vivre en accord avec soi", ainsi qu’il le présente, et c’est une merveille.
Il faut rendre hommage à Sara Mishara à la caméra et à Louisa Schabas pour la direction artistique : le rendu à la fois intimiste et légèrement sépia de l’image et des décors donnent encore plus de force à ce film qui ressemble à la traversée d’un secret. Habitué à cette démarche qui consiste à faire des films sur des gens qu’il ne connaît pas pour mieux les approcher (tel Jo pour Jonathan sur les relations de deux frères dans le monde des voitures), Giroux a réussi à entrer dans la communauté hassidique du quartier Mile End de Montréal près d’Outremont, une des plus grandes communautés ultra-orthodoxes juives du monde, après Jérusalem et New York - au début du XXe siècle, on l’appelait la Petite Jérusalem.

Comment faire pour pénétrer ce milieu ultra fermé quand on n’en fait pas partie, et surtout pour en faire un film ?

Il raconte qu’il a parcouru le quartier, celui de son enfance, à bicyclette, tentant de pénétrer dans les synagogues, fréquentant les rues et les pâtisseries, jusqu’à entrer en contact avec des pratiquants qui l’ont surpris par leur sens de l’humour et de la fête, emplis en même temps d’une force spirituelle oubliée de notre monde occidental.

C’est ce contraste qui lui a donné l’idée de faire se rencontrer deux personnes que rien ne devaient rapprocher et qui, pourtant, vont finir par "tomber en amour", comme on dit au Québec. Félix, héritier désenchanté qui partage la fortune de son père avec une sœur un peu absente, et Meira, lumineuse et sensible jeune épouse hassidique, vouée à une vie faite d’interdictions.

Leur rencontre n’est que le fruit du hasard, dans un salon de thé pendant que Meira aide sa petite fille à dessiner, et va se poursuivre jusqu’à leur fuite à Venise via Brooklyn.
Tout en demi-teintes, le film avance sur le terrain des sentiments avec une grande délicatesse et nous montre comment naît et se consolide un amour entre deux personnes qu’en fait tout oppose.

Félix et Meira n’est nullement manichéen puisqu’il ne fait pas du mari un horrible tyran, ni de sa femme une pasionaria.
Le charme naît à la fois de la mise en scène et du calme avec lequel les choses se déroulent, comme un lent fleuve qui emporte tout sur son passage, en détruisant pour mieux recréer.

"Sans compter, déclare le réalisateur, qu’une vie vécue dans la religion depuis l’enfance, ça ne s’efface pas du jour au lendemain. […] Je voulais mettre en relief d’un côté une société avec trop de repères, trop de règles et, de l’autre, une société gâtée, libre, qui est paradoxalement complètement désorientée".

Jean-Max Méjean
Jeune Cinéma en ligne directe (mercredi 4 février 2015)

Félix et Meira. Réal : Maxime Giroux ; sc : M.G. et Alexandre Laferrière ; ph : Sara Mishara ; mont : Mathieu Bouchard-Malo ; mu : Olivier Alary. Int : Martin Dubreuil, Hadas Yaron, Luzer Twersky, Anne-Élisabeth Bossé (Canada, 2014, 105 mn).

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