Inés María Barrionuevo n’est pas une débutante avec trois longs métrages présentés aux festivals de Berlin et de San Sebastian. Ce quatrième, dont elle n’a pas écrit le scénario - il est de Andrès Aloi -, répond pourtant fidèlement à un de ses films précédents, Atlántida (2014), qui traitait déjà de l’adolescence, comme quoi "c’est ainsi que fonctionne l’art : on revient toujours aux mêmes thèmes", ainsi que le déclare la réalisatrice.

Lorsque sa riche (mais avare) grand-mère tombe gravement malade, Camila doit déménager à Buenos Aires avec sa mère et sa sœur. Elle quitte alors son lycée public pour une institution privée traditionaliste.

Dans ce milieu hostile, elle fait la rencontre de Clara, une camarade de classe qui cache un secret. Une révolution féministe est sur le point de commencer.

Voici donc un film sur les secrets et les affres de l’adolescence, un de plus, qui choisit son lot de clichés sur la révolte, le trouble du désir sexuel, la lutte des classes et tout ce qui titille ces jeunes gens en train de découvrir la vie. Mais le film est beaucoup plus fin qu’on ne pourrait le penser.

Après la première demi-heure, on découvre un petit bijou bien construit, derrière ses apparentes banalités, servi par une bonne réalisation et une interprétation de qualité, notamment Nina Dziembrowski, 18 ans, et qui, comme son personnage, terminait ses études au moment du tournage. Les couleurs ont été choisies par la réalisatrice et la directrice de la photographie, Constanza Sandoval, en fonction de la situation. Mais ce qui est le plus intéressant, c’est la manière dont une femme peut réaliser un film qui parle de désir féminin dans un monde (celui du cinéma) particulièrement masculin, et dans un pays qui a connu la dictature, mais surtout la domination patriarcale.

Inés María Barrionuevo considère qu’on ne peut réaliser un film sur les femmes et sur leur sexualité que si l’équipe est en phase avec le sujet. Elle sait bien que certains réalisateurs ont des méthodes extrêmes pour obtenir le meilleur de leurs acteurs, mais elle préfère travailler à partir du dialogue.

Elle confirme que "heureusement, les quelques hommes qui faisaient partie de l’équipe étaient merveilleux et tout était très harmonieux".
On mesure ici les changements, les progrès qui ont été accomplis depuis l’époque des généraux et des dictateurs.

Jean-Max Méjean
Jeune Cinéma en ligne directe

Camila sortira ce soir (Camila saldrá esta noche). Réal, sc : Inés María Barrionuevo ; sc : Andrès Aloi ; ph : Constanza Sandoval ; mont : Sebastian Schjaer. Int : Nina Dziembrowski, Adriana Ferrer, Carolina Rojas (Argentine, 2021, 103 mn).