home > Films > Cléo, Melvil et moi (2023)
Cléo, Melvil et moi (2023)
de Arnaud Viard
publié le mercredi 5 juillet 2023

par Jean-Max Méjean
Jeune Cinéma en ligne directe

Sortie le mercredi 5 juillet 2023


 


Le début du film est très agaçant. Déjà parce qu’il nous fait nous remémorer le confinement qu’on nous a imposé et qui a tant fait de dégâts. Et puis cette famille séparée est vraiment énervante, caricature de bobos filmés en noir et blanc dans les beaux quartiers germano-pratins de Paris. Peu à peu, pourtant, on s’habitue et on finirait presque par s’émerveiller, enfin n’exagérons rien, mais le quatrième long métrage de Arnaud Viard est plus qu’honnête, d’autant qu’on lui doit, en 2020, Je voudrais que quelqu’un m’attende quelque part. (1)


 

Il faut dire qu’il sait utiliser une caméra et filmer des visages, surtout son visage et sa solitude et son désarroi. Et c’est quand apparaît le visage de Marianne Denicourt en pharmacienne douce et sexy que le film s’illumine. Après les chicaneries insupportables qui sont devenues le leitmotiv des films français contemporains d’un couple séparé qui se partage la garde des enfants, avec une Romane Bohringer pas vraiment à son avantage en épouse séparée quérulente, le film bascule enfin dans une sorte de romance sentimentale que n’aurait pas reniée un réalisateur américain des années 1970.


 


 

On l’aura compris, l’intrigue est très mince : à Paris, dans la stupeur du premier confinement, Arnaud, séparé d’Isabelle et papa de Cléo et Melvil, va profiter de cette parenthèse pour prendre soin de ses enfants et faire le point sur sa vie, ce qui le conduit aux souvenirs mais aussi à l’avenir... L’avenir, c’est peut-être Marianne, la pharmacienne du quartier. Ses yeux sont verts, et derrière la vitre en plexiglas, une attirance va naître.


 


 

Arnaud Viard - qui est aussi acteur du film - a le don de transformer ce petit scénario en film quasiment autobiographique. Le lundi 16 mars 2020, quand le président a prononcé à plusieurs reprises "Nous sommes en guerre", il s’était séparé de sa femme récemment, et louait un deux pièces proche de son ancien domicile où vivaient ses 2 enfants, Cléo et Melvil, avec leur mère. Au moment de l’annonce du confinement, ils n’avaient pas d’autres choix que de rester à Paris. Il déclare avoir eu assez vite, le désir de profiter de cette période pour filmer son quartier de Saint-Germain-des-Prés.


 


 

Mais le film n’est pas consacré seulement au confinement. C’est un retour sur soi, une réflexion sur l’amour et le couple, sur le dur métier de scénariste et de réalisateur, sur la panne d’inspiration, sur l’enfermement forcé et tant d’autres choses encore. Il propose, en plus, une sorte de carnet intime, une sorte de "Caro Diario" en noir et blanc d’un homme confiné qui sent le désir et l’amour revenir en lui, et c’est plutôt revigorant, surtout lorsque le noir et blanc et le Paris désert évoquent un peu l’univers de Jean Eustache.

Jean-Max Méjean
Jeune Cinéma en ligne directe

1. Le film, réalisé en 2018 est sorti en salles le 22 janvier 2020, quelques semaines avant l’annonce du confinement. Il est adapté de la dernière nouvelle, Épilogue, du recueil de Anna Gavalda, Je voudrais que quelqu’un m’attende quelque part, paru aux éditions Le Dilettante en 1999.


Cléo, Melvil et moi. Réal, sc : Arnaud Viard ; ph : Martin Roux ; mont : Camille Guyot ; mu : Philippe Jakko, Vincent Delerm, Jean-Marc Fyot et Alex Shelter. Int : Arnaud Viard, Marianne Denicourt, Romane Bohringer, Cléo Viard Garcin, Melvil Viard Garcin, Romain Rondeau (France, 2023, 73 mn).



Revue Jeune Cinéma - Mentions Légales et Contacts