home > Films > Procès Goldman (le) (2023)
Procès Goldman (le) (2023)
de Cédric Kahn
publié le mercredi 27 septembre 2023

par Sylvie L. Strobel
Jeune Cinéma n°424-425, septembre 2023

Sélection de la Quinzaine des cinéastes au Festival de Cannes 2023

Sortie le mercredi 27 septembre 2023


 


Cédric Kahn retrace fidèlement le très médiatique procès en appel de Pierre Goldman, condamné à perpétuité par la cour d’assises de Paris, le 14 décembre 1974, pour des crimes qu’il avait toujours niés (jugement cassé par la Cour de cassation pour vice de forme le 20 novembre 1975) : deux pharmaciennes abattues et un témoin gravement blessé, le 19 décembre 1969, à Paris.


 


 

Arrêté en avril 1970, le déclaré coupable avait été un jeune révolutionnaire, héritier de la mémoire de la Résistance et de la Shoah, cherchant à mériter sa filiation de glorieux parents FTP-MOI, responsable du service d’ordre de l’UNEF à Paris dans une période d’affrontements, parti ensuite pour l’Amérique latine sur les traces du Che, puis de la guérilla vénézuélienne, et revenu petit gangster.


 

Pour chaque fait divers, le caractère plus ou moins symbolique, d’une époque, d’un milieu, d’un problème peut soulever une guerre des partisans. En l’espèce, la mise en cause de la police, la voix des colonisés, la notoriété des partisans du bénéfice du doute, confortés ensuite par l’assassinat de Pierre Goldman ont donné à cet épisode une charge particulière (1).


 

Le film est une sorte de documentaire théâtral, avec quasi unités d’action (le procès) et de lieu (les Assises d’Amiens). L’unité de temps, celui des audiences, est entrelardée de brefs retours sur les quelques minutes du drame, ou les quelques heures de l’enquête. Les partitions sont bien préparées, tant du côté des juges, que des avocats, des témoins ou de l’accusé, le livre retentissant, Souvenirs obscurs d‘un juif polonais né en France (2), écrit en prison par Pierre Goldman, fournissant les réparties authentiques.


 


 


 


 

Il faut dire que le coup de la reconstitution au tribunal des conditions de l’identification de l’accusé hirsute, les yeux cernés parmi six jeunes flics bien astiqués était une séquence surprenante, dont le spectateur de 2023 peut se demander si des avocats pourraient l’obtenir aujourd’hui...


 

C’est un film cinglant et passionnant. On peut juste signaler une petite inadéquation du casting : malgré la très grande qualité de son interprétation insolente, Arieh Worthalter est un peu trop grand, un peu trop mûr. Pierre Goldman n’a pas eu le temps d’atteindre cette stature, il restait un jeune révolté sombre et maigre.


 


 

Évidemment, on attend de Cédric Kahn une suite aussi théâtrale : le procès fictif des assassins de Pierre Goldman, en 1979, avec les scénarios fasciste, basque, marseillais, barbouze….

Sylvie L. Strobel
Jeune Cinéma n° 424-425, septembre 2023

1. Pierre Goldman (1944-1979 a été assassiné à Paris le 20 septembre 1979. L’affaire reste non élucidée.

2. Pierre Goldman, Souvenirs obscurs d‘un juif polonais né en France, Paris, Le Seuil, 1975.


Le Procès Goldman. Réal : Cédric Kahn ; sc : C.K. & Nathalie Hertzberg ; ph : Patrick Ghiringhelli ; mont : Yann Dedet. Int : Arieh Worthalter, Arthur Harari, Stéphan Guérin-Tillié, Nicolas Briançon, Aurélien Chaussade, Christian Mazucchini, Jeremy Lewin, Jerzy Radziwiłowicz, Chloé Lecerf, Laetitia Masson, Didier Borga, Arthur Verret, Paul Jeanson, François Favrat, Maxime Tshibangu (France, 2023, 115 mn).



Revue Jeune Cinéma - Mentions Légales et Contacts