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Débâcle (2022)
de Veerle Baetens
publié le mercredi 28 février 2024

par Jean-Max Méjean
Jeune Cinéma en ligne directe

Sélection officielle en compétition du Sundance Film Festival 2023
Prix du jury pour Rosa Marchant

Sortie le mercredi 28 février 2024


 


Inspiré d’un roman néerlandais de Lize Spit, Het Smelt, un titre qu’on pourrait traduire par "Ça fond", le premier long métrage de l’actrice Veerle Baetens est très prenant et dérangeant. Elle déclare qu’elle a fait ce film pour tous ceux qui enfouissent leurs souffrances au plus profond d’eux-mêmes, là où personne ne pourra les deviner, ce qui les dévore peu à peu. Un mutisme cache souvent un esprit qui hurle à s’en briser la voix. En français, Débâcle, fait allusion, même si le sens a été un petit peu égaré depuis, à la fonte de la glace, puisque c’est ce mot que les géographes donnent à ce phénomène naturel.


 


 


 

Le film raconte une histoire sordide survenue dans l’enfance, et le retour de l’héroïne quelques années plus tard pour une sorte de vengeance. Mais autant la jeune Eva était présente, active, désireuse d’être aimée et adoptée par son petit cercle d’amis, autant la Eva contemporaine est secrète, sombre, et prête à accomplir l’irréparable. C’est d’ailleurs cette dualité entre les deux personnages qui fait la force du film. On découvrira peu à peu le sens du titre, dans la manière dont le film commence - des plans sur Eva préparant de la glace pour un pique-nique.


 


 

Le film est une prouesse qui lui a demandé des années de travail à elle et à son coscénariste Maarten Loix. "Dans le roman, les personnages sont plus froids. Dans le film, je souhaitais que les spectateurs s’attachent à eux malgré tout. Il fallait opérer des transformations sans perdre l’atmosphère du livre, dans lequel trois récits temporels s’entremêlent sur plus de 430 pages. À l’écran, nous avons resserré l’intrigue sur deux temporalités", raconte la réalisatrice. La mise en scène est remarquable, et le film alterne avec brio les séquences anciennes et contemporaines pour créer un climax angoissant et sensible.


 


 


 

Et, si la photographie de Frederic Van Zandycke est parfaite, on remarque surtout l’interprétation hors pair des deux actrices incarnant le personnage principal à deux moments distincts de sa vie. On peine à s’attacher à la Eva adulte Charlotte De Bruyne parce qu’elle s’est coupée des autres - elle est mal à l’aise, elle ne sourit pas -, mais elle est impressionnante dans sa présence / absence, et elle impose une sorte de rédemption à la petite Eva horriblement abusée autrefois. Quant à la jeune Eva, Rosa Marchant elle a reçu le Prix d’interprétation à Sundance en 2023.


 

Débâcle parle de la violences faite aux enfants dans une société qui n’est ni protectrice ni réparatrice.

Jean-Max Méjean
Jeune Cinéma en ligne directe

1. Veerle Baetens, née en 1978, actrice dans des courts métrages et des séries télévisuelles depuis 2000, a commencé à jouer en 2000. Elle a été révélée par son rôle dans Alabama Monroe (The Broken Circle Breakdown) de Felix van Groeningen (2012), rôle pour lequel elle a reçu le Prix de la meilleure actrice au Festival du film de Tribeca 2013.


Débâcle (Het smelt). Réal, sc : Veerle Baetens ; sc : Maarten Loix, d’après le roman de Lize Spit (2016) ; ph : Frederic Van Zandycke ; mont : Thomas Pooters ; mu : Bjorn Eriksson. Int : Rosa Marchant, Charlotte De Bruyne, Sebastien Dewaele, Naomi Velissariou (Belgique, 2022, 111 mn).



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