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À bout portant (1964)
de Don Siegel
publié le mardi 1er août 2017

par Jérôme Fabre
Jeune Cinéma n° 314, décembre 2007

Sorties le dimanche 8 novembre 1964 et les mercredis 19 juin 2002, 15 avril 2015, 2 août 2017.
Sortie en DVD en 2007 (Carlotta)


Très belle édition que celle de À bout portant (1964) du petit maître Don Siegel proposée par Carlotta.

La copie rend en particulier parfaitement les couleurs vivement saturées et hyperréalistes de ce précurseur du néo-polar, nouvelle adaptation, après celle fort différente de Siodmak, des Tueurs de Hemingway.


 

Où un John Cassavetes rentré et marmoréen reprend - après Lancaster - une des plus belles et rares figures du roman / film noir, celle de la victime consentante, résignée, éteinte, qui rappellerait un peu Meursault.


 


 

Comme ce dernier, Johnny North ne "joue pas le jeu", l’homme blessé devrait, contrairement à l’animal, se défendre bec et ongles : Johnny, lui, choisit de mourir passivement dès les premières images.
Les raisons objectives seront vainement cherchées via, ce qui est largement plus classique, une série de flash-back : pire encore, il apparaît que le renoncement de Johnny est originel, peu emprunt de la série d’événements qui forme la fiction de À bout portant.


 

On voit immédiatement ce qui a convaincu Siegel d’accepter la tâche, qui pouvait aisément laisser ses empreintes : désespoir tu, cruauté nue, violences cathartiques, absence d’héroïsme, sécheresse du trait.
Cassavetes est suffisamment las et fatigué pour le rôle, Lee Marvin en tueur, double à peine moins pathétique de Johnny, Angie Dickinson femme fatale comme nulle autre, miroir glacé et terrifiant des peurs de Johnny.


 

À noter que c’est également le dernier rôle à l’écran de Ronald Reagan, dans un personnage qui anticipe tristement la suite : capitaliste, cupide, corrompu, crétin.


 

Si À bout portant ne peut être considéré comme un authentique chef-d’œuvre, c’est certainement parce qu’il reste très mécanique et schématique, un des défauts récurrents de son réalisateur et que, à trop intérioriser, il passe complètement à côté des scènes autres que d’action.

Jérôme Fabre
Jeune Cinéma n° 314, décembre 2007

À bout portant (The Killers). Réal : Don Siegel ; sc : Gene L. Coon d’après Les Tueurs de Ernest Hemingway ; mu : John Williams ; ph : Richard L. Rawlings ; mont : Richard Belding. Int : Lee Marvin, Angie Dickinson, John Cassavetes, Ronald Reagan (USA, 1964, 93 mn).

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