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Croix de bois (les) (1932)
de Raymond Bernard
publié le dimanche 9 novembre 2014

par Lucien Logette
Jeune Cinéma en ligne directe

Sortie mercredi 12 novembre 2014

Sélection officielle Cannes Classics 2014
Sélection Il Cinema ritrovato, Bologne 2014


 


Roland Dorgelès publie Les Croix de bois en 1919. Mais il faut dix ans pour que des producteurs, en l’occurrence Pathé-Natan, en acquièrent les droits cinématographiques.


 

Non que la Grande Guerre ait été un sujet tabou : La Grande Parade ou Les Ailes de Wellman (1927) avaient obtenu un grand succès en France, de même que la première version muette de Verdun, visions d’histoire de Léon Poirier (1928). (1)


 

Mais l’arrivée du parlant accéléra les choses. Simultanément, les États-Unis et l’Allemagne relancèrent l’évocation de la grande boucherie, via À l’ouest, rien de nouveau et Quatre de l’infanterie (2) l’un et l’autre remarquables de force et de justesse dans la dénonciation : pas de fibre patriotique pincée, pas de glorification de l’héroïsme, simplement de la boue, du sang et des larmes.


 

C’est sur les mêmes bases que Raymond Bernard se lance dans l’adaptation des Croix de bois. Comme il le déclare à Cinémonde (4 février 1932) : "Tout l’esprit de mon film et sa raison d’être - si j’ai pu atteindre mon but - se résument en ces quelques mots que Dorgelès écrivit un jour sur le Livre d’or des musiques militaires : Je ne sais qu’une belle sonnerie de guerre, c’est : Cessez-le-feu !.


 

Renvoyons à l’ouvrage de Éric Bonnefille, qui, dans son Raymond Bernard, fresques et miniatures consacre vingt-huit pages au film. (3).


 

Empruntons-lui aussi ces quelques lignes, suffisantes pour justifier de le voir ou le revoir :

"Trois quarts de siècle après sa réalisation, Les Croix de bois conserve une force peu commune et, par sa retenue dans l’émotion, par sa mesure dans le discours, par ses nuances, par son refus, en général, des symboles appuyés ou des effets faciles, frappe au cœur et à l’esprit le spectateur d’aujourd’hui. Tourné alors que les souvenirs de 14-18 sont encore à vif, mais avec un recul permettant d’échapper aux passions, il demeure l’un des regards les plus importants, à la fois simple et poignant, que le cinéma ait porté sur la Première Guerre mondiale. D’autres films ont creusé bien plus profondément les sillons de l’absurdité des combats, de la dénonciation des intérêts supérieurs ou de la hiérarchie militaire. Bien peu donnent à ce point l’impression d’être à hauteur d’homme".

Lucien Logette
Jeune Cinéma en ligne directe (9 novembre 2014)

1. La Grande Parade (The Big Parade) de King Vidor (1925), avec John Gilbert et Renée Adorée, est sorti en France en 1926.
Les Ailes (Wings) de William A. Wellman (1927), avec Clara Bow, est sorti en France en 1928. C’est le premier film à recevoir l’Oscar du meilleur film en 1929 (et un second Oscar pour les effets spéciaux de Roy Pomeroy.
Verdun, visions d’histoire de Léon Poirier (1928), avec Albert Préjean et Antonin Artaud, a été tourné sur les champs de bataille et les ruines des forts de Vaux et de Douaumont. Le film est sorti au m^me moment en France et aux USA, en novembre 1928. Une version sonorisée a été réalisée en 1931.

2. À l’ouest, rien de nouveau (All Quiet on the Western Front) de Lewis Milestone (1930) d’après le roman de Erich Maria Remarque (1929) est sorti en France en 1930 et en 1950. Il a reçu l’Oscar 1930 du meilleur film et l’Oscar du meilleur réalisateur.
Quatre de l’infanterie (Westfront 1918 : Vier von der Infanterie) de Georg Wilhelm Pabst (1930) est sorti au printemps 1930 en Allemagne et à la fin de l’année en France.

3. Cf. "Éric Bonnefille, Raymond Bernard, Fresques et miniatures," Jeune Cinéma n°333-334, automne 2010.


Les Croix de bois. Réal : Raymond Bernard ; sc : R.B. & André Lang, d’après le roman de Roland Dorgelès ; ph : Jules Kruger & René Ribault ; déc : Jean Périer ; son : Antoine Archimbaud ; mont : Lucienne Grumberg. Int : Pierre Blanchar, Gabriel Gabrio, Charles Vanel, Raymond Aimos, Antonin Artaud, Paul Azaïs, René Bergeron, Raymond Cordy, Marcel Delaître, Jean Galland, Pierre Labry, Jean-François Martial, Marc Valbel, Christian-Jaque, René Montis, Geo Laby (France, 1932, 110 mn).



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