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Échec à l’organisation (1973)
de John Flynn
publié le vendredi 25 mars 2016

Cf. Hiver 2013-2014
Les saisons, chronique DVD

par Jérôme Fabre

Jeune Cinéma n°358, mars 2014


 


Parmi les durs à cuire du cinéma d’action des années 70, plus méprisé encore par la critique bien pensante que Siegel, Hill (qui rend d’ailleurs hommage à son pair dans les compléments) et Milius réunis, John Flynn a allumé quelques bâtons de dynamite, dont l’aujourd’hui peu vu Rolling Thunder (1977), qui lui resta comme un tatouage pas moins préjudiciable qu’une svastika, le film étant immédiatement taxé d’apologie du vigilante fasciste (alors que la figure du père de famille qui fait usage de la vengeance privée suite au massacre des siens figure, sans être autant honnie, dans de nombreux films, tel Mad Max.

Très belle idée dès lors que de sortir le meilleur film de Flynn, The Outfit (*), même si la copie, apparemment reprise d’une récente exhumation américaine, est assez médiocre.
Le film met en scène une aventure du gangster hard-boiled Parker (ici renommé Macklin), héros de la saga de Donald Westlake / Richard Stark (vingt-quatre titres publiés), qui donne régulièrement lieu à de très correctes adaptations, du Point de non-retour de Boorman (1967) au récent Parker de Taylor Hackford (2013).

Robert Duvall n’est certainement pas le Parker physiquement le plus crédible.
Avec sa figure en "bloc de béton ébréché", ses épaules carrées, ses bras trop longs prolongés de deux battoirs, l’antihéros de Stark trouva meilleure personnification avec Lee Marvin (Le Point de non-retour), Jason Statham (Parker) et surtout… Michel Constantin (Mise à sac de Alain Cavalier, 1967).

Dans l’esprit de la série, son air mi-blasé, mi-amusé fait cependant de Duvall un bon candidat, d’autant que le film colle à la narration terre-à-terre, dépouillée et antipsychologique des romans - à l’opposé de la version onirique et mythologique de Boorman. Il est le tâcheron du crime, loin des fastes d’une certaine Mafia (l’"Outfit" du titre, à laquelle s’attaque Parker sans sourciller), mais il est néanmoins, et Flynn affectionnait ce type de personnage, "bon à ce qu’il fait".
Le style de The Outfit, un peu terne dans sa rigueur, elliptique, concret, avec ses soudains embrasements de violence, montre à quel point Parker était finalement le parfait contemporain du Nouvel Hollywood. Les épaules de Joe Don Baker, le spleen de la récemment disparue Karen Black, l’aridité de l’immense Robert Ryan et la musique claquante de Jerry Fielding complètent cette aventure taciturne et nonsensique.
Flynn est un grand metteur en scène du face à face, dont on espère avec Philippe Garnier, qui signe le roboratif livret d’accompagnement, la réhabilitation, ainsi que la publication en éditions honnêtes d’autres films de la même veine, tels que les mésestimés Haute sécurité (1989, face à face Stallone-Sutherland) et Pacte avec un tueur (1987, Woods-Dennehy).

par Jérôme Fabre

Jeune Cinéma n°358, mars 2014

* Wild Side.

Échec à l’organisation (The Outfit). Réal sc : John Flynn d’après le roman The Outfit de Richard Stark ; mont : Ralph E. Winters. Int : Robert Duvall, Robert Ryan, Karen Black, Sheree North, Joe Don Baker, Elisha Cook, Timothy Carey, Marie Windsor, Jane Greer , Anita O’Day (États-Unis, 1973, 93 mn).

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