Chaque année, en automne, revient le festival de Mannheim-Heidelberg.
C’est toujours un étrange plaisir que d’arpenter les rues du centre de Mannheim, et le tracé résolument géométrique que leur a donné l’électeur palatin qui initia en 1606 la construction de la ville en damier.
Comme dans la cité future du roman de John Brunner, La ville est un échiquier, on passe d’un des 144 blocs à l’autre, de N1 (le centre de presse) à K2 (cinéma Atlantis) ou à G7 (cinéma Odeon), selon des lois de déplacements aléatoires qui tiennent aux horaires et aux lieux de projection, et qui, vus du ciel, assimilent assurément les festivaliers à des pièces d’un jeu géant animées de mouvements vaguement prévisibles - la marche du fou-cinéphile.
Nul besoin donc, lorsque l’on vient là, de se munir d’un indicateur des chemins de dérive, puisqu’un abécédaire et un boulier suffisent pour s’y diriger. Ce qui n’interdit pas les surprises, comme ce café Murnau, qui, à chaque fois qu’on le débusque dans la brume du soir, nous étreint d’une pincée de rêve.
Mais Mannheim, ce n’est pas seulement les traces d’un urbanisme utopique rigide (et d’ailleurs le vieil Heidelberg est à côté pour contrebalancer), c’est un des festivals les plus anciens du marché, des plus réputés quant à l’ouverture vers des terres peu fréquentées, et dont on est toujours certain de repartir enrichi de quelques découvertes.
Pas de confrères français dans la salle de presse - manifestement, le manque de têtes d’affiche et de blockbusters n’attire ni la "grande" presse, ni les revues spécialisées. Les 400 journalistes viennent d’ailleurs, et c’est bien comme ça.