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Paulina (2015)
de Santiago Mitre
publié le mardi 12 avril 2016

par Laetitia Kulyk
Jeune Cinéma n° 366-367, été 2015

Sélection de la Semaine de la critique au festival de Cannes 2015

Sortie le mercredi 13 avril 2016


 


Paulina abandonne des études en droit brillantes pour aller enseigner en zone rurale. Au hasard d’un retour tardif, elle est agressée par une bande de jeunes qu’elle n’identifie que plus tard comme étant des élèves de sa classe. Elle décide de régler les choses à sa manière, en ne dénonçant pas ses violeurs et mène le récit vers un cours inattendu qui interpelle et sidère.

En filmant son actrice au plus près des émotions, Santiago Mitre nous donne à voir le drame qui se joue en même temps qu’il nous implique dans les contradictions qui habitent son personnage. Le malaise est palpable, les émotions partagées.

Dolores Fonzi s’impose dans ce rôle avec force, alors même que les décisions que son personnage assume semblent aller à l’encontre du bon sens.
Loin d’émettre un jugement, Mitre nous livre un portrait de femme meurtrie mais déterminée qui, à travers ce drame, laisse entrevoir les failles d’un système, d’un mode de pensée contre lequel la protagoniste se bat.


 


 

Le récit, morcelé dans le temps, répétant parfois les mêmes scènes d’un autre point de vue, dynamise subtilement la narration. Les acteurs, parfaits dans leurs rôles d’enseignante-victime, père-juge anéanti, amie-collègue solidaire mais interloquée ou encore élèves-agresseurs, portent totalement le film et transmettent à travers leurs regards toutes les tensions.

La scène du retour en classe est, en ce sens, particulièrement maîtrisée.
Les regards, le point de vue de la caméra et le montage restituent dans cette scène tout le malaise du drame que vit Paulina, prise dans son propre dilemme : n’est-elle pas venue enseigner et "sauver" en quelque sorte ces jeunes en leur donnant à voir le monde dans sa lucidité ?


 

Paulina, victime d’elle-même et de ses convictions, questionne la limite entre choix et destinée, action et victimisation, et le paradoxe qui s’impose à elle n’en constitue à ses yeux pas vraiment un.
Il est le signe d’un chemin à suivre et à assumer, une réalité à intégrer et non à subir, un défi au destin qui questionne et société et individus.

Laetitia Kulyk
Jeune Cinéma n° 366-367, été 2015.

Paulina. Réal : Santiago Mitre ; sc : S.M., Mariano Llinas ; ph : Gustavo Biazzi ; mont : Delfina Castagnino, Leandro Aste ; mu : Nicolas Varchausky. Int : Dolores Fonzi, Oscar Martinez, Esteban Lamothe, Cristian Salguero (Argentine-Brésil-France, 2015, 103 mn).



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