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Celui qu’on attendait (2016)
de Serge Avédikian
publié le mardi 7 juin 2016

par Jean-Max Méjean
Jeune Cinéma n° 374, été 2016

Sortie le mercredi 8 juin 2016


 


Trois ans après Le Scandale Paradjanov, réalisé avec Olena Fetisova, Serge Avédikian revient en Arménie pour son second long métrage de fiction.
Il met en exergue sur son site ces quelques mots : "L’immigration c’est une culture, et la vraie culture de l’immigré, c’est l’intégration. Mais je ne veux pas être un porte-drapeau, je ne porte pas mon "Arménite" en bandoulière. Je porte juste la dualité en moi. Je me suis longtemps senti apatride, aujourd’hui je m’en fous."
On le constate ici, entre admiration pour un drôle de pays en guerre larvée contre son voisin, l’Azerbaïdjan, et satire d’un système qui encore héritier des années soviétiques.

Patrick Chesnais se prête superbement au rôle du comédien français, égaré dans ces terres caucasiennes et qui ne comprend rien à ce qui lui arrive, mais qui, peu à peu, tombera sous le charme du pays et de ses habitants, jusqu’à apprendre quelques mots de leur langue magique.


 

Avédikian dresse un beau portrait de son pays d’origine, avec ses peurs et ses rêves, tout en évoquant de façon très adroite le génocide subi il y a un siècle. En effet, la légende raconte que chaque Arménien possède un ancêtre qui va revenir lui apporter argent et aide. C’est ainsi qu’au fin fond de Khatchik, Patrick Chesnais, perdu entre deux pays, deux cultures et deux langues, va être fêté comme le messie, lui dont le surnom sera vite "celui qui paie", faisant réparer l’électricité du village et repeindre l’école en ruines.

Le film est une "comédie à l’arménienne", qui présente la vie du village et montre comment ce visiteur maladroit va le débarrasser enfin de la mafia locale. Même un petit Français sans envergure, qui passe son temps à appeler sa femme et son agent avec un portable qui ne capte pas, peut changer la vie des gens au fin fond de l’Arménie. Et c’est une réussite plaisante même si la vraisemblance fait défaut.


 

Serge Avédikian a trouvé une nouvelle voie, passant d’acteur au réalisateur de documentaire, puis de court métrage d’animation (Chienne d’histoire, Palme d’or 2010) et enfin à la comédie sociale.
Il se permet même de se moquer, gentiment, de la figure arménienne emblématique de Charles Aznavour, défendu de manière acharnée par un admirateur local. Il est vrai que cela peut agacer le falot Jean-Paul Bolzec, lui qui se contente d’une représentation en Azerbaïdjan, sans même savoir où le pays se trouve.


 

Le réalisateur est parvenu à faire figurer au casting Arsinée Khanjian, épouse de Atom Egoyan, en interprète cocasse d’un policière, façon films soviétiques au second degré. Nous attendons avec impatience le prochain film d’Avédikian, en espérant qu’il nous fera de nouveau rêver avec la belle et folle Arménie.

Jean-Max Méjean
Jeune Cinéma n° 374, à paraître

Celui qu’on attendait. Réal, sc : Serge Avédikian ; sc : Jean-François Derec ; ph : Boubkar Benzabat ; mont : Alexandra Strauss ; mu : Gérard Torikian. Int : Patrick Chesnais, Arsinée Khanjian, Robert Harutyunyan, Nikolay Avétisyan (France-Arménie, 2016, 90 mn).

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