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Voir du pays (2016)
de Delphine et Muriel Coulin
publié le mardi 6 septembre 2016

par Laetitia Kulik
Jeune Cinéma n°374, été 2016

Sélection officielle Un certain regard au festival de Cannes 2016.
Prix du meilleur scénario.

Sortie le mercredi 7 septembre 2016


 


Après leur premier film, 17 Filles, en 2011, Delphine et Muriel Coulin passent à une autre réalité en nous immergeant dans les trois jours de sas de décompression par lequel passent les soldats à leur retour d’Afghanistan.

Les réalisatrices s’attachent aux héroïnes, deux femmes faisant partie d’une unité, et plus précisément à Aurore et Marine.


 

Le but du sas : apaiser les tensions et se libérer des horreurs de la guerre avant le retour au pays. But illusoire, on le comprend très vite, tant les réalités divergent.
Les premiers plans le signifient déjà avec l’arrivée des militaires dans cet hôtel luxueux de Chypre : les tenues kaki, les corps prisonniers des uniformes sous le soleil, la lourdeur du matériel, contrastent, alors qu’ils se dispersent pour s’installer, avec les piscines turquoises, les bikinis, et les touristes qui se déhanchent au rythme d’une musique entêtante.


 

La réalité les rattrape bien vite, à mesure que les soldats revivent, avec l’aide d’un psychologue, les moments difficiles de leur six mois sur le terrain. Les non-dits et malaises sont exprimés, les tensions s’exacerbent, et toute la violence du vécu resurgit et frappe : les femmes, dans cet univers masculin, en sont les premières cibles.


 

Les réalisatrices n’ont pas besoin d’user d’artifices pour montrer l’ironie de la situation. Les personnages disent qu’ils n’ont jamais connu d’expérience aussi luxueuse. Les touristes qui gravitent en toile de fond sont des pantins, déconnectés de toute réalité, alors que, dans les mêmes salons de l’hôtel, on parle de vies humaines, de trahison, d’humiliation et du respect du sens de l’honneur qui devrait se traduire par le silence. Les conflits naissent de ces discordances, de l’acceptation ou non du vécu et du retour à la vie pour effacer.

Un film concis, brut, très justement récompensé par le prix du scénario, qui nous fait voir différemment la guerre et ses ravages.

Laetitia Kulik
Jeune Cinéma n°374, été 2016

Voir du pays. Réal, sc : Delphine & Muriel Coulin, d’après le roman de Delphine Coulin ; ph : Jean-Louis Vialard ; mont : Montage : Laurence Briaud ; cost : Isabelle Pannetier. Int : Ariane Labed, Soko, Karim Leklou, Ginger Roman, Jérémie Laheurte (France-Grèce, 2016, 102 mn).

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