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Sea Is Behind (the) (2014)
de Hicham Lasri
publié le mardi 27 septembre 2016

par Jean-Max Méjean
Jeune Cinéma n° 375-376, automne 2016

Sortie le mercredi 28 septembre 2016


 


Après le succès inattendu mais mérité de C’est eux les chiens (2013), on attendait avec intérêt le dernier film de Hicham Lasri.
Malheureusement, The Sea Is Behind donne l’impression d’un exercice de style, dans un beau noir & blanc, avec quelques taches de couleurs éparses, évoquant peut-être l’imaginaire de ses maîtres, Luis Buñuel et David Lynch.
Film désespéré sur la solitude et la tristesse de ce nouveau monde qui émerge, il pêche par une sorte d’absence de narration qui dérange, et empêche de comprendre tous les ressorts de cette histoire, une sorte de cauchemar sans beaucoup de repères.


 

Le titre reprend l’imprécation lancée en 711 par le chef des Omeyyades, Tāriq ibn Ziyād, lorsqu’il engagea la conquête de la péninsule ibérique à la tête de 12 000 hommes. À Gibraltar, ayant brûlé ses navires, il tint en effet ce discours à ses soldats :

Ô gens, où est l’échappatoire ?
La mer est derrière vous, et l’ennemi devant vous,
Et vous n’avez par Dieu que la sincérité et la patience.

C’est là le sens de ce titre.


 

"J’aime bien l’idée de montrer un monde souillé, déclare Hicham Lasri, où il n’y a plus d’espace pour la tolérance ni pour l’espoir. C’est un monde alternatif, parallèle au nôtre en effet, dans lequel je ne montre pas de gens ordinaires. Il s’agit presque d’un pays de science-fiction, qui renvoie d’ailleurs au monde dépeint dans mon roman Stati©. Mais cela ne m’empêche pas de montrer des choses actuelles, comme l’intolérance bien sûr, mais aussi la prostitution, la zoophilie".

Dérangeant, mais pas à la façon de C’est eux les chiens ou de The End (2012), le film est un peu trop esthétisant. D’où ce hiatus avec son propos complètement sombre, eu égard à la transformation radicale et rapide d’une société, pas seulement marocaine, qui se tourne de façon masochiste vers l’intolérance et la violence.


 

Le cinéaste trace les portraits de plusieurs personnages, notamment Tarik, dont le métier consiste à s’habiller en femme et à danser pour les mariages, et son père, anéanti par la vieillesse de son cheval.
Bien sûr, le film est métaphorique, mais tout le monde n’est pas Béla Tarr.
Cependant, Hicham Lasri a les moyens de son talent, et nous espérons beaucoup de son prochain long métrage.

Jean-Max Méjean
Jeune Cinéma n° 375-376, automne 2016


The Sea Is Behind (Al bahr min ouaraikoum). Réal, sc : Hicham Lasri ; ph : Saïd Slimani ; mont : Abdessamane Chaouket ; mu : Jbara, Samia Kadiri. Int : Malek Akhmiss, Fairouz Amiri, Mohamed Aouragh, Hassan Ben Badida (Maroc-France-Liban-Émirats, 2014, 88 mn).



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