home > Festivals > Autres festivals et cycles (par année) > Festivals 2017 > Rencontres du cinéma taïwanais, 3e édition
Rencontres du cinéma taïwanais, 3e édition
Paris, 9-10 février 2017
publié le vendredi 17 février 2017

par Nicole Gabriel
Jeune Cinéma en ligne directe


 


Au programme des Rencontres du cinéma taïwanais 2017, 3e édition 12 courts métrages, inédits en France, ont été proposés, en présence de leurs auteurs, par le Centre culturel de Taïwan à Paris (Paris, 9-10 février 2017). (1)
Salle comble au cinéma parisien Les Trois-Luxembourg pour la soirée d’ouverture où nous avons pu voir quelques uns des courts métrages programmés.


 

Tout d’abord Arnie, de la jeune réalisatrice d’origine philippine Rina B. Tsou, (2015) qui nous emmène, caméra à l’épaule, sur un bateau de pêche amarré dans le port de Kaohsiung et dans le gigantesque entrepôt où travaillent des hommes, tous Philippins. Leur patron taïwanais s’adresse à eux en anglais via une interprète. Les matelots s’égaillent en ville, vêtus de sport comme des touristes, y marchandent des iPhones leur permettant de joindre leur famille, restée au pays, qui sollicite d’eux présents et virements. Arnie, le boute-en-train de la troupe, fait l’emplette de deux bagues et d’un bouquet de fleurs avant de contacter par Skype sa fiancée pour lui faire sa demande en mariage. Las, son plan est contrarié quand il apprend que sa bien-aimée est enceinte d’un autre… Une vue nocturne nous le montre seul, sanglotant sur un banc. D’une grande vivacité, Arnie qui fut présenté à Cannes dans le cadre de la Semaine de la Critique, sait suggérer l’absence, la prégnance des lointains, le divorce entre l’espace et le temps en dépit des outils visant à abolir les distances.


 

Sur un mode élégiaque et esthétisant, Phantom Cinema, de Cheng Li-ming (2016) investit une ruine, un vaste cinéma fermé depuis 1991, dont il tente de reconstituer la mémoire à partir de traces, d’objets abandonnés, de grains de poussière tournoyant dans l’air et d’éclats de pellicule. Usant de la synecdoque, le film présente le passage obligé au guichet, des mains prenant des billets puis une demoiselle s’assoupissant à la manière de La Belle au bois dormant. La magie renaît sous la forme d’un songe au moyen de lampes de poche réactivant les jeux d’ombres chinoises d’autrefois.


 

La meilleure surprise est venue avec le troisième court, Nia’s Door, de Kek-Huat Lau (2015) couronné l’an dernier à Clermont-Ferrand.
C’est un chef-d’œuvre d’observation et de sensibilité. Nia est une jeune femme de ménage philippine qui débarque dans une famille chinoise. On lui montre sa chambre - un débarras - ; elle s’occupe du grand-père et de la petite fille de la maison ; elle fait les courses, prépare le dîner, est sans cesse aux ordres. Mais elle sait se défendre et oppose bientôt une résistance passive opiniâtre... Avec subtilité, le cinéaste traduit cette lutte sourde d’une femme tiraillée entre les demandes d’argent de sa propre famille et les exigences de ses employeurs. Il fait aussi entrevoir l’embarras de la famille chinoise dont l’intimité est troublée par une présence étrangère. À mi-chemin entre le documentaire et la microfiction, le film de Lau Kek-huat capte les sentiments ambigus de ses protagonistes dans un espace confiné, grâce à l’utilisation d’acteurs non-professionnels. Ces derniers ne miment pas la vie mais la restituent avec justesse.

D’autres titres étaient dignes d’intérêt comme 100th Birthday Wish de Lien Chien-hung (2016) propos doux-amer sur le grand âge, You Are My Sunshine de J. Huang (2016) retrouvailles d’une jeune mère et de son fils de 7 ans confié jusque-là à une nounou, et Babes’ Not Alone de Lee Yi-shan (2016) qui raconte avec humour et un surprenant sens des couleurs comment une jeune fille se trouve condamnée au baby-sitting le jour de son anniversaire.


 

Tous ces courts métrages ont en commun le goût de la fiction et de la comédie, parfois dramatique, toujours pimentée par le réel et disent avec fraîcheur les contradictions d’une société prise entre tradition et modernité.

Nicole Gabriel
Jeune Cinéma en ligne directe

1. Rencontres du cinéma taïwanais 2017, 3e édition Centre culturel de Taïwan à Paris et Kaohsiung Film Archive (Paris, 9-10 février 2017).


* Arnie de Rina B. Tsou (2016).

* Phantom Cinema de Li-Ming Cheng (2016).

* Nia’s Door de Kek-Huat Lau (2015).

* Für Elise de Albert Ventura Roldan (2015).

* In the Land of the Blind de Ke-Yun Chen (2015).

* The Evil Inside de Lingo Hsieh (2014).

* 100th Birthday Wish de Chien-Hung Lien (2016).

* You Are My Sunshine de J. Huang 2016

* Babes’ Not Alone de Yi-Shan Lee (2016).

* Life of Silence de Cheng-Ru Ying (2014).

* And Soon The Darkness de Kai-Chih Chang (2014).

* Midnight Dance de Mian Mian Lu (2015).


 



Revue Jeune Cinéma - Mentions Légales et Contacts