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De sas en sas (2016)
de Rachida Brakni
publié le mardi 21 février 2017

par Bernard Nave
Jeune Cinéma n° 378-379, février 2017

Sortie le mercredi 22 février 2017


 


Actrice de théâtre de formation puis de cinéma, Rachida Brakni passe maintenant à la réalisation.
Pour son premier film, elle affiche d’emblée une certaine ambition, pour ne pas dire une ambition certaine, qui cadre avec sa personnalité. De sas en sas s’enracine dans le monde pénitentiaire par la bande, à savoir les femmes qui viennent rendre visite à des détenus que nous ne verrons jamais. Des femmes que Rachida Brakni suit dans leur parcours collectif, par une journée caniculaire, dans la succession des lieux qui conduisent au parloir. Elle évacue ainsi toute tentation documentaire, même si on perçoit combien la réalité du monde carcéral imprègne le film dans le moindre détail. De la même manière, elle se refuse à bâtir une thèse qui en ferait un film politique, même si le politique se faufile par tous les pores du récit.


 

Il y a d’abord cette idée que la prison constitue un monde dans lequel l’enfermement, d’abord physique, devient vite mental. Ces femmes sont prises dans le réseau des murs tristes, des grilles qui les séparent des gardiens. Le petit monde qu’elles constituent devient un lieu de confrontations entre elles mais aussi de tensions en elles-mêmes. Rachida Brakni recrée ce qui fait la force du théâtre à l’intérieur d’une représentation cinématographique qui joue sur le plan séquence, sur les plans serrés, les mouvements de caméra. Cette tension entre théâtre et cinéma produit une force émotionnelle qui culmine dans la scène où l’on entend le mouvement de révolte des prisonniers dans la chaleur de la pièce où se trouvent les femmes.


 

Le film reprend ainsi au théâtre une construction rythmique basée sur une montée des tensions pour aboutir à une sorte de relâchement final qui compose un espace pictural fort dans lequel Rachida Brakni dispose ses actrices comme sur une scène filmée en plan large, dans une respiration en suspension.

Elle donne à son film une dimension tragique qui tient à sa manière de camper les personnages, à les inscrire dans un décor dépouillé qui leur permet de toucher à quelque chose d’essentiel et d’authentique. Une authenticité qui tient aussi beaucoup aux performances des actrices professionnelles ou non.

Bernard Nave
Jeune Cinéma n° 378-379, février 2017

De sas en sas. Réal : Rachida Brakni ; sc : Rachida Brakni Raphaël Clairefond ; ph : Katell Djian ; mu : Mehdi Haddab, Smadj. Int : Zita Hanrot, Samira Brahmia, Judith Caen, Fabienne Babe (France, 2016, 82 mn)

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