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Plus jamais seul (2016)
de Alex Anwandter
publié le mardi 2 mai 2017

par Jean-Max Méjean
Jeune Cinéma en ligne directe

Sortie le mercredi 3 mai 2017


 


Scandalisé par le meurtre d’un de ses admirateurs, le jeune Daniel Zamudio, victime d’un crime homophobe, Alex Anwandter, musicien et cinéaste chilien très populaire dans son pays, a décidé de passer à la réalisation. On imagine difficilement ici Pascal Obispo tourner un film à la mémoire d’un fan travesti assassiné par des homophobes. Ce n’est manifestement pas le cas au Chili, et ce premier film, signé par un artiste qui n’est pas de la profession, est plutôt une réussite.


 

Pablo, lycéen homosexuel, s’est pris de passion pour le transformisme.
Aidé par une amie, il va se maquiller, s’habiller en femme et donner des récitals amateurs. Dans son appartement aux couleurs marronnasses, avec un père déprimé, la vie de Pablo n’est pas bien gaie.
Son père, interprété par Sergio Hernandez, acteur chilien et collaborateur de Raul Ruiz, travaille dans une fabrique de mannequins qui vont servir de décor à plusieurs séquences. Ce sont pour la plupart des mannequins masculins, dépourvus d’organes sexuels. Corps sans vie, pâles et blanchâtres, ils servent de prolepse à la condition des hommes anonymes et inertes qui entourent le jeune Pablo. Et cette image renvoie aussi à la problématique du père qui s’intéresse peu à son fils et le considère un peu comme un des mannequins qui l’entourent.


 

Dans une Santiago imaginaire, mais aussi sordide que le Bronx des années 70, la vie s’écoule pour Pablo, entouré de vagues copains, d’un petit ami homosexuel honteux, mais surtout d’une kyrielle de femmes, dont une voisine envahissante qui a mis le grappin sur son père. Un jour, alors qu’il s’est fait teindre en blond, en compagnie de sa copine, il est agressé par la petite bande homophobe à laquelle appartient son amie. Personne n’intervient pour le défendre, pas même elle, et Pablo, violemment tabassé, sera laissé pour mort.

On pensait jusqu’alors regarder un film sur un travesti, voire transgenre, on découvre que le père devient le personnage principal : il va entreprendre le combat pour tenter de sauver son fils complètement défiguré.

Le film pose bien sûr la question de la violence faite encore aux homosexuels de nos jours, même si on nous rebat les oreilles avec le changement et la tolérance. Les corps des homos sont toujours autant en danger. Et une fois la violence accomplie, on se sent bien démuni, désespéré, enragé, comme ce père qui ne saura réagir qu’en commettant l’irréparable.


 

Film de musicien - la musique allie l’opéra, la folk et l’adaptation espagnole de Lucio Battisti -, Plus jamais seul est aussi une belle métaphore sur la grande solitude de notre monde assourdi par le bruit et la fureur.

Jean-Max Méjean
Jeune Cinéma en ligne directe

Plus jamais seul. Réal, sc, mu, mont : Alex Anwandter ; ph : Matias Ilianes. Int : Sergio Hernandez, Andrew Bargsted, Jaime Leva, Antonia Zegers (Chili, 2016, 81 mn).

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