home > Films > Office (2015)
Office (2015)
de Johnnie To
publié le mercredi 9 août 2017

par Nicole Gabriel
Jeune Cinéma en ligne directe

Sortie le mercredi 9 août 2017


 


Le prolifique cinéaste hongkongais Johnnie To explore le genre musical avec Office, qui traite du tsunami financier de 2008 et adapte la pièce à succès de Sylvia Chang, Design for Living, laquelle se réfère à Noel Coward et à Ernst Lubitsch.

Le film est visible en 2 ou 3D.
Le travelling aérien transperçant la rame de métro qui inaugure la bande nous plonge dans un univers virtuel démarqué du réel, avec la foule d’employés de bureau pointant à l’heure pile.


 


 

Une gigantesque horloge sera le leitmotiv.
Le quai de métro donne un accès direct à l’entreprise (tout est tourné en studio). La clarté de l’image est aveuglante : on ne distingue plus les scènes d’intérieur de celles dites d’extérieur. Ni les séquences diurnes des nocturnes. Le lieu et le temps appartiennent à la firme.

Cette abstraction du facteur humain s’exprime dans l’espace privé : la moitié de la chambrette du Rastignac de la finance est occupée par ses costumes bleu marine et ses chemises immaculées ; le mur du studio de la jeune comptable relève de l’esthétique néoplasticienne.


 


 

Le regard de To sur le monde de l’entreprise est ironique, mais faut-il y voir une critique sociale, voire politique ?

D’emblée, se pose la question de la hiérarchie, avec l’accès à l’ascenseur réservé aux cadres supérieurs. Le plan de carrière se dessine pour le jeune protagoniste.
Si, pour Lubitsch, l’adultère relève du jeu de l’amour et du hasard, ici, il est l’un des modes du fonctionnement entrepreneurial. Du haut en bas de l’échelle sociale, chacun trompe l’autre ou est, par l’autre, trompé - nul n’étant dupe.
Le ton affiché est à la plaisanterie, mais la spéculation boursière et l’investissement érotique sécrètent des effets morbides. L’édulcoration musicale, au lieu d’alléger la fable, l’éternise et en atténue la causticité. La variété internationale n’a de chinoisant que son écart des modes et des courants occidentaux les plus actuels.

L’interprétation est remarquable.


 

Le cinéaste emploie son acteur fétiche Chow Yun-Fat dans le rôle du PDG ; celui de sa fille est tenu par la photogénique Lang Yueting ; la maîtresse-femme est interprétée par l’auteure de la pièce ; le sémillant Ziyi Houang campe l’innocent aux mains pleines.


 


 

La mise en scène est de haute précision, la photographie de Cheng Siu-Keung, éclatante à souhait, le passage du virtuel au réel bien rendu par la belle scénographie de William Chang.


 

Le design, puisque design il y a, juxtapose signes et sigles suivant une logique spatiale en même temps que de placement de produits. Les objets vont du coupe-ongles japonais Kai aux appareils photo Canon, des chaises Magis aux écrans Dell, de la sonnerie de portable Samsung au cabriolet Mercedes. Celui-ci s’avérant fatal…

Nicole Gabriel
Jeune Cinéma en ligne directe

Office (Hua li shang ban zu). Réal : Johnnie To ; sc : Sylvia Chang ; ph : Cheng Siu-Keung ; mont : Allen Leung, David M. Richardson ; mu : Chan Fai Young, Lo Ta-Yu. Int : Chow Yun-Fat, Sylvia Chang, Chan Eason, Ziyi Wang, Lang Yueting (Chine-Hong-Kong, 2015, 119 mn).

Revue Jeune Cinéma - Mentions Légales et Contacts