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Espèces menacées (2017)
de Gilles Bourdos
publié le mardi 26 septembre 2017

par Gisèle Breteau Skira
Jeune Cinéma n° 382-383, automne 2017

Sortie le mercredi 27 septembre 2017


 


Dès la première image du film, l’écriture de l’écrivain américain Richard Bausch transparaît en touches sombres, à travers les images lumineuses et claires du cinéaste Gilles Bourdos. Celles-ci sont d’autant plus brillantes qu’elles explosent peu à peu en éclats tragiques. Espèces menacées campe trois destins familiaux qui se croisent et brisent l’harmonie classique des liens affectifs et amoureux.


 

Une jeunesse en manque de repères, désorientée, à la recherche de nouveaux modèles : Mélanie, dont le père de l’enfant qu’elle porte est plus âgé que son propre père, Anthony, incapable de vivre, qui plonge dans les études du biélorusse et ne parvient pas à se défaire des bras de sa mère, et enfin le couple Joséphine (Alice Isaaz) et Tomasz (Vincent Rottiers), celui-ci affichant la violence conjugale dans ce qu’elle a de plus effrayant.


 

Le scénario va de l’image enchanteresse de la beauté des personnages et de la promesse d’un bel avenir à la plus vertigineuse descente aux enfers, dans le mutisme et la violence.

Gilles Bourdos manifeste une maîtrise étonnante des dialogues, des silences, des regards : tout se joue par ces échanges des uns et des autres par le seul moyen de leurs expressions, parfois de leurs gestes.
C’est le cas avec le père de Joséphine, un Grégory Gadebois si taiseux qu’il en devient bruyant de tout son corps, ou encore Éric Elmosnino, au visage voilé d’un éternel sourire, qui regarde la vie s’écouler, surprenante et barbare, ou encore Damien Chapelle, gracieux et gracile, qui jongle entre sa mère Brigitte Catillon et la vie qui l’assaille de tous côtés.


 


 

Le film est un condensé de gravité porté par un immense optimisme devant la vie. L’interprétation passe du trouble à l’émotion, de la séduction à la rage, autant de sentiments incarnés par l’émouvante Alice Isaaz et Vincent Rottiers, décidément inquiétant.

Bourdos a le sens des images, il l’avait magistralement montré dans son Renoir, et ici encore. Par une approche très sensorielle de l’espace, une perception presque tactile des couleurs, une vision pénétrante, il parvient à créer une rencontre quasi psychique avec ces "espèces menacées".

Gisèle Breteau Skira
Jeune Cinéma n° 382-383, automne 2017

Espèces menacées. Réal, sc : Gilles Bourdos ; sc : Michel Spinosa, d’après Richard Bausch ; ph : Ping Bin Lee ; mont : Yannick Kergoat ; mu : Alexandre Desplat. Int : Alice Isaaz, Vincent Rottiers, Grégory Gadebois, Suzanne Clément, Éric Elmosnino, Alice de Lencquesaing, Carlo Brandt, Agathe Dronne, Damien Chapelle, Brigitte Catillon, Pauline Étienne, Frédéric Pierrot, Micha Lescot (France, 2017, 105 mn).

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